Droit à l’image
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 21 juin 2023 10:40
- Écrit par Claude Séné
De nos jours, presque aucun évènement ne se produit sans qu’il y en ait une trace sous forme de photo, d’enregistrement sonore ou de vidéo, captés par des témoins au moyen de leur téléphone portable, ou enregistrés par des caméras de surveillance postées un peu partout et en grand nombre par des municipalités en mal de popularité électorale. C’est au point que l’on peut se dire qu’un évènement n’existe vraiment que dans la mesure où il peut être ainsi visualisé. Faut-il pour autant divulguer et diffuser systématiquement les enregistrements ainsi récupérés ? Ce serait faire fi un peu rapidement du droit à l’image. Chacun reste libre d’en interdire la publication.
Un exemple récent concerne l’agression d’une grand-mère de 73 ans et de sa petite-fille de 7 ans, captée par une caméra de surveillance à Bordeaux. On y voit un homme s’en prendre violemment à ces deux personnes, jetant à terre la plus âgée. La scène est confuse, mais l’homme semble renoncer à ses projets, quels qu’ils fussent, peut-être grâce aux abois d’un chien, présent sur les lieux. L’homme sera identifié et arrêté, il est déjà connu pour des délits, mais rien de comparable à cette agression. La vidéo sera postée sur les réseaux sociaux, en premier lieu, semble-t-il, par Éric Zemmour, et sera reprise très rapidement par les chaînes d’information continue, sans avoir pris la peine de demander l’autorisation des victimes, qu’ils n’auraient pas obtenue. D’ailleurs, celles-ci portent plainte pour atteinte à leur vie privée. Certains médias ont décidé de ne pas diffuser la vidéo, d’autres de la flouter. D’autres encore, comme TMC, claironnent qu’ils ne la diffusent pas, tout en en montrant de larges extraits.
Les politiques ne tardent pas à emboîter le pas dans le chemin initié par Éric Zemmour, qui a visiblement des arrière-pensées d’exploitation de la situation pour dénoncer la politique migratoire, alors que l’agresseur est né en France. Sur le plateau de BFMTV, Julien Odoul, du Rassemblement national, en remet une couche, avant de se faire tacler par Aurélien Taché, écologiste, qui pointe la confusion de son interlocuteur entre nationalité et couleur de peau. Mais la palme de la récupération politique revient, pour le moment, à Nicolas Florian, du groupe les Républicains, ancien maire éphémère de Bordeaux, qui a saisi l’occasion d’une tribune pour fustiger la politique et le laxisme supposé de son successeur écologiste à la mairie. Il se livre à une attaque en règle de son rival, Pierre Hurmic, en bénéficiant de l’intérêt suscité par ce fait-divers très spectaculaire. Toute cette agitation et la tentative d’amalgame entre délinquance et immigration, qui n’a ici aucun fondement, débouchent sur une issue inattendue. L’auteur de l’agression souffre de troubles psychiatriques graves, empêchant pour le moment son maintien en garde à vue. Cela rappelle d’ailleurs l’assaillant d’Annecy, dont on ignore toujours les motivations actuellement. Un peu de retenue ne nuirait sans doute pas au débat.