Jusques à quand, Catilina, abuseras-tu de notre patience ?
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 5 janvier 2023 10:59
- Écrit par Claude Séné
En feuilletant la presse virtuelle ce matin, mon attention a été attirée par la photo publiée par le site du Parisien, sur l’équivalent numérique de cinq colonnes à la une, comme on disait autrefois. Elle représente l’arrivée triomphale du gouvernement au grand complet, parcourant à pied les derniers mètres de la cour d’honneur du palais de l’Élysée, alors que les voitures de maîtres ont été remisées provisoirement avant de revenir se garer sagement devant le perron pour attendre les ministres, qui n’ont pas jugé bon de pratiquer le covoiturage depuis le ministère de l’Intérieur où ils ont pris un petit déjeuner « de travail ».
C’est dans ce genre de circonstances que l’on peut se dire que le réchauffement climatique n’a pas que des inconvénients. Qui aurait pu prédire, comme le rappelait encore récemment le Président de la République, que le temps serait suffisamment clément un 5 janvier pour permettre cette déambulation en costume léger, sans même la plus petite ondée pour gâcher la fête et empêcher d’évoquer les jours heureux qui ne manqueront pas d’arriver, grâce au travail acharné, mais dans la bonne humeur, de ceux qui nous gouvernent ? La température quasi estivale n’a pas obligé non plus les chauffeurs à laisser tourner leur moteur pour éviter un coup de froid fatal à leurs patrons, en pleine grève des médecins généralistes et la crise du logement dans des hôpitaux saturés par les épidémies. Le hasard, qui fait parfois bien les choses, a voulu que la photo gouvernementale, cohabite avec un encart publicitaire (il faut bien vivre) particulièrement adapté à l’air du temps. Il s’agissait de vendre un sweat-shirt à visée plus ou moins humoristique, dont le texte, en anglais, signifie à peu près ceci : « j’ai fait tester ma patience, je suis négatif » et est illustré d’un dessin représentant un chat, à bout de nerfs. Le même vêtement existe aussi avec le slogan : « touchez à mon café et je vous frappe si fort que même Google ne pourra pas vous retrouver ».
C’est cette histoire de patience pas inépuisable qui m’a fait me souvenir de la phrase de Cicéron citée dans le titre et qui commence la première catilinaire, un des quatre discours prononcés par le tribun pour tenter de chasser Catilina, qui complote contre lui. Et je me demande quand et comment, cette clique de parvenus comprendra qu’elle ne peut pas indéfiniment abuser de la patience des Français en ne tenant aucun compte des réalités sociales et en négligeant à la fois l’avis du peuple, incessamment provoqué et qui subit les conséquences de l’impéritie au sommet de l’état, et les corps intermédiaires que le président s’applique à torpiller, en toute bonne conscience. « Quelle époque, quelles mœurs ! » ajoutait Cicéron. Pas mieux.