Dites bien que ce n’est pas pour le gaz
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 26 août 2022 11:01
- Écrit par Claude Séné
Ce n’est pas la chanson la plus connue de Jacques Brel, mais c’est une de mes préférées. Dans « le gaz », le grand Jacques se prend pour l’employé de la compagnie du gaz, qui vient régulièrement « relever le compteur » dans un petit appartement de la rue de la Madone, occupé par une belle plante, dont les faveurs sont sans doute tarifées. Il y croise nombre de notables qui sont tous là uniquement « pour le gaz », bien entendu. À l’inverse de la chanson, l’Algérie reçoit la visite officielle du président Macron, dans le but évident de décrocher un contrat de fourniture de gaz naturel, sans toutefois en prononcer le nom.
C’est que les relations entre l’ancienne puissance coloniale et la jeune République algérienne ne sont pas au beau fixe, surtout depuis que le président français a cru bon de ruiner les espoirs de réconciliation entre les deux peuples en accusant les dirigeants algériens de profiter du passé colonial pour museler toute opposition. En France, quand on a un problème, on le glisse sous le tapis et l’on crée une commission. Le président français a donc proposé une commission mixte d’historiens des deux rives de la Méditerranée pour ensevelir la question corps et biens, ou du moins gagner quelques années de tranquillité, pour pouvoir commercer en toute quiétude et il semble avoir trouvé une oreille bienveillante du côté du président algérien. Mais avant de pouvoir aborder l’objet principal de la visite, il va falloir déblayer l’autre question qui fâche, celle des visas permettant aux citoyens algériens de se rendre en France. Environ un tiers des demandes sont rejetées par la France, qui conditionne le nombre de réponses favorables au retour massif des ressortissants algériens expulsés pour leur situation irrégulière. Un donnant-donnant mal vécu par les autorités algériennes.
La guerre en Ukraine et les sanctions contre le pouvoir russe ont amené la plupart des pays occidentaux à chercher une alternative à la fourniture du gaz naturel par la Russie. L’Italie a renforcé son accord avec l’Algérie et importera plus de gaz au travers du gazoduc reliant les deux pays. Jusqu’aux Américains, pourtant exportateurs eux-mêmes, qui s’intéressent au gisement saharien. « Allez-y donc tous, rue de la Madone, c’est pas grand, mais y a de la place ». Par une sorte de coquetterie mal placée, le président Macron s’est appliqué jusqu’ici à éviter de prononcer le mot tabou, préférant exalter des valeurs morales, glorifiant la jeunesse et prônant la réconciliation entre les deux pays. La population algérienne n’est pas dupe, qui savoure d’être courtisée pour ses ressources naturelles et compte bien en profiter pour assoir un rapport de forces en sa faveur.
Pour ceux qui voudraient lire les paroles de la chanson, vous les trouverez ici :
https://greatsong.net/PAROLES-JACQUES-BREL, LE-GAZ, 15345.html
et pour l’entendre : https://www.youtube.com/watch?v=HEqOxE6C1lk