L’habit fait le moine
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 25 août 2022 10:18
- Écrit par Claude Séné
Le tout nouveau ministre de l’Éducation nationale a à peine endossé son costume de fonction, qu’il a déjà intégré tous les codes attachés à la fonction, parmi lesquels le plus important, qui consiste à annoncer avec un optimisme indéfectible que la rentrée scolaire se présente sous les meilleurs auspices. Personne ne sait exactement comment la promesse de l’exécutif de mettre un professeur devant chaque élève le jour fatidique pourra être tenue, mais le ministre, Pap NDiaye, lui, avec la foi du charbonnier matinée de méthode Coué s’y est engagé, et donc ça passe ou ça casse, il y aura des contractuels pour boucher les trous.
Une légère inquiétude concerne les transports scolaires, où il manquerait encore 7 à 8 000 chauffeurs de bus, pour des raisons incompréhensibles, mais qui ont peut-être à voir avec un salaire moyen de 800 euros mensuels et des horaires contraignants. Je suggère aux collectivités qui les emploient de transposer la méthode de l’éducation nationale pour le recrutement de ses « professeurs » : la formation sur le tas. On recrute un candidat chauffeur, tout juste pourvu d’un permis généraliste, comme le bac en somme, et on lui donne les rudiments du métier. Il finira bien par y arriver, moyennant quelques incidents de parcours et l’abandon des moins motivés. C’est ce qui est prévu pour pallier le manque de professeurs dans les établissements la prochaine année scolaire. L’état va embaucher des profs souvent armés de leur seule bonne volonté, en leur délivrant une formation initiale de quelques jours, « complétée » à doses homéopathiques par des séances animées par les inspecteurs, qui rappellent furieusement les conférences pédagogiques d’antan, avec une efficacité proche du néant.
Il va manquer au moins les 4 000 postes non pourvus à l’issue des concours, faute de candidatures suffisantes, sans compter tous les postes de remplacement des titulaires absents pour cause de maladie que le ministère n’arrive plus à pourvoir depuis longtemps. Là aussi la conjugaison de salaires de misère et de conditions de travail déplorables, n’est sûrement pas étrangère à la crise des vocations que l’on constate. Le ministère, devant l’urgence de la rentrée, va même organiser un « job dating » destiné à pourvoir très vite 2 000 postes proposés aux chômeurs de l’académie de Versailles. J’imagine d’ici le style de dialogue, inspiré de Bigard, quand il avait encore un petit reste d’humour : tu as un survêt ? Parfait, te voilà prof de gym ! Plus rien ne peut m’étonner après 37 annuités et demie d’exercice professionnel et l’observation attentive de l’absence de progrès depuis mon retrait de la vie active. Nous ne sommes pas loin de toucher le fond. Nous allons envoyer au casse-pipe des générations de professeurs peu ou pas formés, des contractuels précaires comme au bon vieux temps des suppléants éventuels, exploités et jetés sans ménagement si l’on n’a plus besoin d’eux, pour un service dégradé. Ne nous étonnons pas si beaucoup de ces moines-soldats préfèrent se défroquer.