Le soleil se lève à l’Est

Je sais, ce n’est pas vraiment un scoop. Cela fait des millénaires qu’il en va ainsi. Je voulais pourtant saluer l’initiative du maire de la ville de Nancy qui vient de rappeler l’obligation de couper son moteur lorsque l’on est à l’arrêt. Il en coûtera désormais 135 euros si l’on ne respecte pas cette prescription qui fait l’objet d’un arrêté municipal. Le texte rappelle également qu’il en est déjà de même à Londres, en Belgique ou en Suisse, et qu’un arrêté ministériel allait déjà dans ce sens le 12 novembre 1963.

D’ailleurs, je ne me rappelle pas précisément la date, mais j’avais été frappé par le comportement des Allemands notamment et aussi des Polonais, nombreux à traverser la frontière des deux Allemagnes, encore séparées à l’époque. Pendant l’attente pour franchir le poste-barrière, non seulement ils coupaient leur moteur pour ne pas consommer inutilement du carburant, mais la plupart d’entre eux poussaient leur véhicule pour combler les quelques mètres gagnés depuis l’arrêt précédent. L’économie ainsi réalisée n’est pas négligeable puisqu’on estime à 0,8 litre d’essence par heure la consommation d’un moteur au ralenti, ce qui finit par être conséquent dans certaines circonstances. Depuis cette époque, la technologie a évolué et la plupart des véhicules récents sont équipés du système automatique qui coupe le moteur à l’arrêt et le redémarre dès que l’on enclenche une vitesse. Le « start and stop » est cependant facultatif et peut être désactivé volontairement. Il n’est donc pas totalement inutile de rappeler aux automobilistes, de Nancy et d’ailleurs, que ce geste leur permettra de faire des économies, même légères, et de diminuer les rejets de CO2 et de particules fines nuisibles à l’environnement.

Le maire de Nancy est conscient de reprendre une réglementation existante, dont il précise qu’elle est « tombée en désuétude ». On ne saurait mieux dire, puisque le gouvernement lui-même ne se soumet pas à l’arrêté ministériel de 1963 en demandant aux chauffeurs de leurs voitures de fonction de laisser le moteur allumé pour faire fonctionner la climatisation pendant le Conseil des ministres, le 29 juillet dernier. Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, qui venait de vanter l’exemplarité de ses collègues, n’a pu que constater les dégâts et regretter ce manquement illustrant une nouvelle fois le principe du « faites ce que je vous dis et non ce que je fais ». Déjà que les voitures des ministres respectent rarement à la lettre le Code de la route, dépassant allègrement les vitesses autorisées, ce nouveau passe-droit ressemble furieusement à un privilège quelques jours avant l’anniversaire de la nuit du 4 août, supposée avoir aboli cette survivance de l’Ancien Régime. Que l’on se rassure, après cette nuit, le soleil ne manquera pas de se lever à nouveau sur une société toujours aussi inégalitaire.