La méfiance règne

Le Sénat, contrôlé majoritairement par la droite, a rejeté le plan de déconfinement tel qu’il était présenté par le Premier ministre hier, et depuis lors, le gouvernement s’est appliqué à minimiser la portée de ce vote, sous tous les prétextes impossibles et inimaginables. Un obscur secrétaire d’État appelé à commenter le scrutin a indiqué que le Sénat « s’était surtout abstenu » de soutenir ce plan. Techniquement, c’est exact, puisqu’il y a eu plus d’abstentions que de votes positifs et négatifs réunis, mais cela traduit néanmoins la grande défiance des sénateurs envers un exécutif très en dessous de ce qu’exigerait la situation.

On est bien loin d’une union sacrée que le président et son équipe dépassée par les évènements auraient appelé de leurs vœux. Évidemment, la portée pratique de ce rejet sera plus que limitée. Le gouvernement souligne que le plan repassera en 2e lecture à l’Assemblée nationale et sera, sauf énorme surprise, adopté par les députés, dont l’avis est prépondérant en cas de désaccord entre les deux assemblées. Il n’en reste pas moins qu’aux yeux de l’opinion, c’est une nouvelle fissure dans le soutien à l’exécutif au moment où il aurait grand besoin d’unanimité. Ce à quoi il lui faut renoncer. Il doit nécessairement convaincre du bien-fondé de ses décisions, et ce n’est pas gagné, comme en témoigne la fronde des maires de la région parisienne qui s’inquiètent de la faisabilité d’un retour à l’école dans les conditions définies par le gouvernement. Mêmes difficultés pour l’organisation des transports en commun, pris entre des exigences contradictoires de remplir leur mission de service public tout en protégeant les usagers et en préservant la rentabilité de leurs entreprises.

L’exercice est d’autant plus délicat que l’on ne peut pas demander l’onction de la représentation nationale pour la jeter aux orties dès lors qu’elle se dérobe. Ce qui ressort clairement en ce moment, c’est que, quoi qu’en dise tel ou tel ministre, le déconfinement se fera, à la date prévue ou peu s’en faut. D’abord pour honorer la parole du président, qui s’est engagé certes imprudemment, mais ne peut plus reculer sauf à perdre le peu de crédit qui lui reste. Et aussi, et peut-être surtout, parce que la situation économique ne peut pas se perpétuer encore longtemps, sans risque de naufrage ou de banqueroute. Il reste à tenter de persuader l’opinion que le pouvoir fait tout pour minimiser le coût humain et sanitaire qu’entraînera inévitablement la sortie du confinement. D’où ces avalanches de recommandations, de règlements et de prescriptions impossibles à respecter, pour démontrer que l’état est inattaquable juridiquement. C’est bien ce qui inquiète les maires qui ne veulent pas être les dindons d’une mauvaise farce dont on les tiendrait pour responsables, et coupables.

Commentaires  

#1 Jacotte 86 06-05-2020 13:01
Et toi tais toi..
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