La TVA sociale pour les nuls

Le Premier ministre cherche toujours une quarantaine de milliards pour boucler un budget impossible à équilibrer en l’état, surtout en s’interdisant par avance toute augmentation des impôts. Il n’y a pas, en France comme ailleurs, d’argent « magique » que l’on pourrait distribuer sans compter. C’est un jeu à somme nulle dans lequel il y a inévitablement des gagnants et des perdants, comme au Pari mutuel urbain pour les courses de chevaux. François Bayrou a eu l’honnêteté de prévenir que tous les Français devaient s’attendre à payer pour redresser une situation financière de plus en plus insoutenable.

C’est dans ce contexte qu’il a ressorti une vieille mesure proposée en son temps par Nicolas Sarkozy et rapidement abrogée par François Hollande, la TVA dite sociale qui participerait au financement de la Sécurité sociale et serait payée par les consommateurs, tout en permettant d’alléger le coût du travail, réputé très élevé. Une mesure approuvée par le patronat, qui pourrait bénéficier d’un nouvel effet d’aubaine, sans que cela affecte les superprofits déjà engrangés pour certains d’entre eux et sans aucune garantie d’une augmentation des salaires en contrepartie, comme on l’a vu par le passé quand le Medef promettait la création d’un million d’emplois en échange d’une baisse de TVA.  En revanche, les consommateurs et notamment les plus pauvres d’entre eux devraient payer plein pot une taxe particulièrement injuste, contrairement à l’impôt sur le revenu par exemple, qui est progressif. Le risque de ce genre de mesure, c’est d’être totalement inefficace pour l’emploi, tout en pénalisant les plus bas salaires qu’elle est supposée relever.

Le diable se nichant dans les détails, les pauvres seraient encore plus pauvres, les riches encore plus riches, et toute la société exposée au risque inflationniste inhérent au système. Globalement, il s’agirait de faire basculer le financement d’un dispositif de Santé considéré comme un des plus favorables au monde, sur les catégories sociales non productives, en particulier les retraités, considérés comme privilégiés, et moins sur les actifs comme c’est le cas aujourd’hui. Cette mesure, si elle était retenue, ne s’attaquerait en rien aux inégalités criantes qui caractérisent la société française et que notre organisation sociale de plus en plus coûteuse ne peut plus compenser. L’hôpital, l’école, l’ensemble de l’appareil de l’état craque de partout, faute de financement, mais le pouvoir renvoie la balle aux partenaires sociaux, supposés régler tous les problèmes à moyens constants, faute de quoi il reprend la main et impose ses choix alors qu’il ne dispose d’aucune majorité parlementaire. Au mieux, quelques économistes suggèrent d’affecter uniformément la TVA sociale à la baisse des cotisations salariales, et donc de conserver une hiérarchie inique dans l’échelle des rémunérations, écart de 40 % entre les hommes et les femmes compris. Cerise sur le gâteau, Bayrou souhaite organiser une parodie de concertation en soumettant la question à un référendum de pacotille.  Avec quel argent compte-t-il le financer ?