Ni coupables ni responsables
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 15 octobre 2024 10:59
- Écrit par Claude Séné
Dans le procès qui s’est ouvert hier à Châteauroux après un report en janvier 2024 en raison de l’énormité du dossier, il n’y aura pas de représentants de la puissance publique, malgré les défaillances évidentes de l’institution qui aurait dû veiller à la santé et au bien-être des mineurs placés sous son autorité, l’Aide sociale à l’Enfance du département du Nord. Cette affaire est un véritable scandale qui met en lumière des dysfonctionnements, mais aussi des failles institutionnelles inacceptables et malheureusement, peut-être plus répandues qu’on ne le croit. Il n’y aura dans le box des accusés, une vingtaine de personnes au total, outre les deux principaux instigateurs d’un véritable trafic d’êtres humains, que des exécutants.
En résumé, l’aide sociale à l’enfance du Nord se retrouvant avec des dizaines d’enfants sur les bras entre 2010 et 2017 et ne sachant quoi en faire faute de familles d’accueil sur place a eu recours à une association qui se révèlera plus que douteuse, pour placer ces jeunes dans des familles éloignées dans l’Indre, la Haute-Vienne ou la Creuse. Ces enfants « difficiles » donneront du fil à retordre aux familles qui les prendront en charge, faute de formation spécifique et de motivation autre que pécuniaire. Ils leur feront subir des sévices psychologiques et physiques entraînant pour beaucoup un état de stress post-traumatique. L’ASE du Nord a bafoué toutes les règles en vigueur et a couvert des agissements inacceptables. Les responsables de l’association qui a perçu au moins 630 000 euros pour l’accueil et l’hébergement des jeunes avaient un casier judiciaire, qui n’a pas été vérifié, pour des faits de violence et d’agression sexuelle. Les sommes perçues n’ont pas été déclarées aux impôts. Aucune de ces familles n’avait demandé ni reçu le moindre agrément exigé par la loi.
Pire encore, les jeunes étaient fréquemment hébergés dans des conditions d’hygiène et de confort déplorables, indignes d’un pays civilisé, et la plupart ont subi des sévices tels que des coups ou une strangulation, des humiliations diverses, l’administration de doses importantes de calmants, et probablement des attouchements. N’en jetez plus, a-t-on envie de clamer ! et pourtant le département du Nord ne sera pas cité à comparaître, ni comme auteur ou complice présumé des faits, ni même comme témoin, malgré les plaintes qu’il a reçues et classées sans suite. Il ne s’est pas non plus constitué partie civile pour se retourner contre des personnes qui auraient failli à leur tâche. Non, c’est « circulez, il n’y a rien à voir ». Cependant, le système de protection de la jeunesse à la française, s’il a des aspects positifs, a aussi de nombreux trous dans la raquette. Les enfants de la DDAS, comme on les appelle souvent, tombent parfois sur des familles admirables qui les élèvent comme leurs propres enfants, mais un contrôle efficace est plus que jamais indispensable.