Le survêtement

Dans un de ses rares sketches pertinents avant de virer totalement dans la gaudriole sexiste, vulgaire et finalement peu drôle, Jean-Marie Bigard évoquait la façon dont les profs de gym dont il a fait un temps partie étaient recrutés. À l’entendre, il suffisait de posséder un survêtement pour être réputé compétent dans cette noble profession. Il semble que la sélection pour le poste de ministre de l’Éducation nationale du gouvernement Barnier n’ait pas été beaucoup plus exigeante. La qualité principale de madame Anne Genetet, une personne probablement aussi estimable qu’une autre, semble bien d’avoir été recommandée par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal dans une alchimie savante de dosage entre partis de la coalition.

Ce choix réactive l’éternel débat sur la nécessité, ou non, de posséder des compétences techniques pour occuper une fonction ministérielle. J’ai le privilège d’avoir connu ou subi maints ministres de l’Éducation nationale, provenant d’horizons les plus divers. Celui qui connaissait le mieux l’institution scolaire de l’intérieur, pour avoir gravi tous les échelons depuis le modeste poste d’instituteur, était un certain René Haby, dont les réformes et l’instauration d’un « collège unique » ont été vivement controversées. À l’inverse, René Monory, le garagiste de Loudun, n’avait aucun lien apparent avec le ministère de l’Éducation dont il avait été chargé par le Premier ministre Jacques Chirac lors de la cohabitation avec François Mitterrand. Il faut noter par ailleurs qu’il avait également été ministre de l’Économie sans avoir jamais ouvert le moindre manuel en la matière. C’est sous son magistère que se déroulera la réforme confiée à son ministre délégué, Alain Devaquet, qui mettra la moitié de la France dans la rue pour la refonte de l’université.

Sans être nécessairement technicien du poste ministériel en question, un minimum devrait être d’avoir une certaine affinité avec le domaine de compétence concerné, ou du moins de s’y intéresser. Or, Madame Genetet n’était pas le premier choix de Michel Barnier qui avait précédemment proposé le poste à Madame Violette Spillebout, qui l’avait accepté, et possédait une certaine légitimité à l’exercer, comme membre de la commission de l’éducation à l’Assemblée nationale. De son côté, Anne Genetet est plutôt intéressée par les questions de défense et de diplomatie. Mais elle est bosseuse, et elle apprend vite, dit-on dans son entourage. Il va lui falloir battre des records pour y parvenir, car le temps, c’est ce qui a manqué le plus aux ministres successifs qui ont voulu dompter le mammouth, selon l’expression d’un de ses prédécesseurs le plus détesté des enseignants, Claude Allègre. Sous la 5e République, un ministre de l’Éducation a tenu 2 ans en moyenne, mais le rythme s’est accéléré depuis le second quinquennat d’Emmanuel Macron, et la fin de la longévité de Jean-Michel Blanquer. Et personne ne sait quand ce gouvernement tombera.

Commentaires  

#1 jacotte 86 25-09-2024 16:28
mais tout le monde dit qu'il tombera et alors peut-être plus dure sera la chute
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