Plouf plouf

Alors, il y a deux écoles, sur cette comptine. Desproges avait opté pour la version « pouf pouf », moi je m’en tiendrai au classique « plouf plouf » pour vous narrer la façon dont j’imagine que le président de la République a choisi Michel Barnier comme Premier ministre, après d’interminables consultations vouées à l’échec. En désespoir de cause, il a probablement estimé qu’au point où il en était, le plus simple, et peut-être le plus efficace, c’était de s’en remettre au hasard, comme dans les cours de récréation, quand il s’agit de désigner celui qui va mener le jeu.

On commence par réunir tout le monde et l’on démarre. À droite, il y a le petit Xavier, propre sur lui, avec une tête de premier de la classe, et à gauche l’expérimenté Bernard définitivement bloqué en cycle de fin d’études primaires. « Plouf plouf », dit Emmanuel, joignant le geste à la parole, « ce se-ra toi qui se-ra Pre-mier mi-nis-tre », en désignant les candidats à tour de rôle. Il a l’air de ne penser à rien, mais en réalité, il compte frénétiquement pour calculer sur qui va tomber la dernière syllabe, et il utilise le subterfuge habituel pour gagner du temps et guider le hasard afin qu’il désigne celui qu’il préfère. « Mais comme le roi Jor-dan et la reine Ma-rine ne le veulent pas, ce se-ra donc toi ! » Et à la surprise générale, son bras décrit un quart de tour vers la droite et son doigt pointe sur le petit Michel, qui passait par là comme lou ravi de la crèche et se fait un plaisir d’accepter en toute modestie d’être le sauveur de la France.

Emmanuel vient de réussir à prendre une nouvelle fois les Français à contre-pied. Il a choisi un des battus des primaires des Républicains de 2021, dont la « gagnante », Valérie Pécresse, ne fera que 4,7 % des voix à la présidentielle, un score confirmé aux législatives anticipées de l’été dernier. Le président justifie son choix par la mansuétude escomptée du Rassemblement national, qui daigne accepter de cohabiter avec le nouveau Premier ministre en attendant de juger sur pièces. À mon avis, c’est tout vu. La question n’est pas de savoir si le Rassemblement national votera la censure du gouvernement Barnier, mais quand. Et la réponse, c’est bien évidemment : quand cela arrangera Marine Le Pen pour la conquête du pouvoir. Le parcours qui attend le nouveau Premier ministre s’apparente à un steeple-chase, avec des obstacles très rapprochés, et la moindre barre accrochée peut entraîner la chute du cavalier. Un sans faute serait presque miraculeux. Le nouveau gouvernement sera déjà très difficile à constituer, et il risque d’être renversé dès le vote du budget, pierre de touche des options politiques qui révélera les clivages entre une majorité hypothétique et une opposition bien réelle.

Commentaires  

#1 jacotte 86 06-09-2024 11:23
ça mériterait d'être mis dans une série palpitante sur Netflix...quand va t-on arrêter de se faire balader par un ado monté en graine!
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