E=mc²

« Il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre ». Ce serait le nouveau mantra du président de la République au sujet de la situation politique inextricable dans laquelle il a fourré le pays et pour laquelle il cherche désespérément une solution en sachant parfaitement qu’elle n’existe pas. Surtout si l’on fait tout pour ne pas voir l’éléphant au milieu de la pièce. Nan ! je déconne. Vous y avez cru ? Bien sûr que la phrase n’est pas d’Emmanuel Macron, qui se ferait hacher menu plutôt que de reconnaître la moindre erreur dans la séquence politique que nous traversons par sa faute, mais bien d’Albert Einstein.

Visiblement, Emmanuel Macron cherche surtout à gagner du temps et à faire passer un choix personnel pour l’expression d’une sagesse supérieure détenue par les seuls dirigeants de droit divin, dont il fait évidemment partie, inaccessible au peuple vulgaire qui ne détient qu’une légitimité de seconde zone à condition de « bien voter ». Tout ce qu’on lui demande, c’est de désigner un président et de confirmer son vote dans la foulée en le dotant d’une majorité confortable pour lui permettre de gouverner à sa guise pendant la durée de son mandat. À la décharge de Macron, ce n’est pas lui qui a inventé le système. La mise en place du quinquennat et l’inversion du calendrier électoral ont grandement contribué au verrouillage du processus de concentration des pouvoirs dans les mains du président de la République. Un grain de sable a enrayé cette belle mécanique quand le peuple a refusé de voter massivement pour les partisans du Prince. Privé du confort d’une majorité automatique, alors que ses décisions s’imposaient quand même avec un simulacre de démocratie mâtiné de 49,3, il a tenté le diable en pariant sur sa bonne étoile, et il a perdu.

Qu’Emmanuel Macron ait perdu son pari ne me fera pas pleurer sur le lait renversé, mais il entraîne dans sa chute le pays livré à une crise institutionnelle, dont il ne peut sortir que par un exercice d’humilité du Président, ce dont il semble totalement incapable. Il a tenté de dissoudre le peuple, sans succès. Il n’avait qu’une porte de sortie, nommer le ou la représentante du groupe le plus nombreux issu des élections législatives en le chargeant de former un gouvernement acceptable par les autres formations politiques. Il a fermé volontairement cette porte en outrepassant ses prérogatives, sans laisser à l’Assemblée nationale l’occasion d’exercer les pouvoirs qui lui reviennent. Il ne peut pas dissoudre à nouveau cette assemblée avant le délai d’un an exigé par la Constitution. Il lui reste un droit, qui ne résoudra pas immédiatement la crise, mais qui permettrait aux Français d’envisager l’avenir plus sereinement : démissionner et convoquer de nouvelles élections présidentielles. Le dernier mot reviendra à ce brave Albert : « Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais, en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue ».