On ne prête qu’aux riches

La campagne électorale américaine, bien qu’elle ne soit pas encore officiellement commencée, bat déjà son plein depuis le remplacement de Joe Biden par Kamala Harris et sa désignation prochaine par la Convention démocrate qui se tiendra la semaine prochaine à Chicago. Le camp républicain, un temps désorienté par le changement du candidat opposé à son poulain, s’est vite remobilisé et axe ses critiques sur des insultes telles que l’accusation de communisme, encore plus grave outre-Atlantique que le crime d’infanticide déjà évoqué par ailleurs. Et voilà réactivé le fantasme du « vol de l’élection » par les Démocrates qui manipuleraient les résultats à leur avantage.

C’était déjà cette allégation totalement fausse qui avait servi de prétexte aux partisans de Donald Trump, bien encadrés par la mouvance extrémiste QAnon, pour lancer une tentative de coup d’État en s’emparant du Capitole, haut lieu de la démocratie américaine. Comme toute bonne théorie conspirationniste, la rumeur s’est emparée d’un fait divers réel, qui concerne la dissémination mondiale d’une maladie connue sous le nom de Mpox, ou la variole du singe. L’OMS a d’ailleurs communiqué sur le sujet, en indiquant que la situation était sous contrôle. Mais une vidéo est apparue sur les réseaux sociaux, dans laquelle Donald Trump dénonce par avance une fraude électorale et une manipulation des résultats basée sur la peur engendrée par la pandémie. Un discours apparemment convaincant, mais tiré de tout contexte, puisqu’il a été prononcé le 30 août 2023, et concernait un variant du Covid mis en avant à cette époque. Un message qui ne prouve strictement rien, si ce n’est l’obstination de l’ancien président à employer des méthodes plus que douteuses, faute d’arguments de fond.

En l’occurrence, il n’a même pas été nécessaire d’utiliser des moyens modernes de trucage basé sur l’intelligence artificielle, mais on sait désormais comment faire dire à un personnage des phrases qu’il n’a jamais prononcées, en cas de besoin. Le plus important, c’est la vraisemblance du propos, plus que sa véracité. Si l’on s’amusait à mettre un discours courtois et bienveillant dans la bouche de Donald Trump, il est probable qu’une grande partie du public n’y croirait pas une seconde. Alors que les accusations gratuites et les flots de haine seraient probablement identifiés comme tout à fait possibles. On peut d’ailleurs se demander quelles étaient les motivations des premiers à avoir diffusé cette vidéo, ainsi que celles des personnes qui l’ont ensuite relayée. Voulaient-ils dénoncer une tentative grossière de manipuler l’information, dont l’ancien président ou ses soutiens se seraient rendus coupables, ou, au contraire, une dénonciation de méthodes destinées à salir le nom de Donald Trump ? Les accusations volent tellement bas aux États-Unis qu’il est bien difficile pour nous de suivre toutes ces péripéties, dont le public local semble raffoler.