Devoirs de vacances

Un président de la République devrait avoir droit, comme tout être humain, à une période de vacances pendant laquelle il pourrait se ressourcer tout en restant joignable en cas d’urgence. C’est donc un usage bien établi que les présidents successifs s’octroient un moment de repos plus ou moins long, généralement dans la résidence d’été réservée au chef de l’état, dans le fort de Brégançon. Paradoxalement, ces vacances, qui ramènent à la notion de vacance au singulier, d’absence, de vacuité, sont généralement présentées comme studieuses. Il faut éviter à tout prix l’idée de vide, dont la nature et supposément les Français, auraient en horreur.

C’est particulièrement vrai cette année parce que le président s’est lui-même infligé un pensum en refusant de nommer un Premier ministre à l’issue du processus démocratique des élections législatives, s’arrogeant un pouvoir absent explicitement de la Constitution, celui du bon plaisir du monarque républicain. Sans le dire précisément, il s’assoit également sur l’usage républicain consistant à nommer un Premier ministre issu du groupe le plus nombreux à l’Assemblée nationale, en le remplaçant par un candidat PPCM (plus petit commun multiple) ou PGCD (plus grand commun dénominateur) un mouton à 5 pattes compatible avec l’opposition et l’ancienne majorité, incolore, inodore et sans saveur, et surtout docile et sans états d’âme. Le président a décrété unilatéralement la trêve olympique qui est désormais achevée, et il a emporté à Brégançon son cahier de vacances, le « passeport pour 2027 » et, je suppose, son carnet d’adresses pour faire ses emplettes. À mon avis, il va exploser son forfait pour tenter de dénicher l’oiseau rare qui aura besoin d’un sens du sacrifice hors du commun pour accepter un CDD de quelques mois en attendant que le président retrouve son droit de dissolution.

Tout ça pour ne pas être certain que le nouveau Premier ministre n’explose pas en vol dès le premier texte de loi proposé au vote des députés avec le dépôt d’une motion de censure, ou au mieux dès le vote du budget 2025, qui arrivera rapidement. Le risque n’est pas plus grand en nommant Lucie Castets, présentée par le nouveau Front populaire, que Xavier Bertrand, candidat plus ou moins déclaré officieusement. Des noms circulent, avec ou sans l’approbation des intéressés, tels que celui de Bernard Cazeneuve, qui a déjà fait le job pour le compte de François Hollande, ou de Jean-Louis Borloo qui devrait pardonner l’affront public d’Emmanuel Macron quand il avait piétiné sans ménagements le rapport qu’il lui avait pourtant demandé sur les banlieues, car son plan était trop cher. Je doute que l’ancien maire de Valenciennes accepte de servir à nouveau de paillasson élyséen si toutefois le poste lui était proposé. À moins qu’Emmanuel Macron n’officialise le foutage de gueule aux Français en renommant Gabriel Attal, comme une sorte de pied de nez à la nation.