Prophétie
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 10 novembre 2025 09:53
- Écrit par Claude Séné
Nul n’est prophète en son pays, c’est bien connu. C’est peut-être la raison pour laquelle on entend très peu Emmanuel Macron s’exprimer sur le territoire national depuis quelque temps. À moins que son temps de parole hexagonal soit indexé sur sa cote de popularité qui n’en finit plus de descendre inexorablement vers des profondeurs abyssales, battant de nouveaux records négatifs à chaque salve de sondages, comme un perchiste fait durer le plaisir en gagnant centimètre après centimètre une nouvelle marque. Mais, comme on le sait, Emmanuel Macron a un avis sur tout, qu’il estime le meilleur, et ne peut donc pas tenir longtemps sa langue, même s’il sait que ce sera à son détriment.
C’est donc à l’étranger, malgré son engagement du 15 mai 2017, à peine élu, de ne pas parler de politique française hors du territoire, que le Président s’est exprimé à plusieurs reprises récemment. Son intervention pour « préciser » l’engagement de son Premier ministre de suspendre la réforme des retraites a été particulièrement embrouillée et n’a amené que de la confusion dans un dossier déjà peu clair. Comme il se sent obligé de démontrer à la presse étrangère et accessoirement à l’opinion en France, qu’il détient toujours les clés du camion, il a déclaré la semaine dernière depuis le Mexique, en réponse à une interview de la chaîne Televisa : « Les bijoux seront retrouvés, ils seront arrêtés, ils seront jugés ». Une promesse manifestement imprudente, malgré la mobilisation des forces d’investigation. En pratique, il faut sans doute considérer cet engagement comme une prophétie que le président espère autoréalisatrice, mais qui pour le moment s’apparente davantage à une incantation, un vœu pieux ou à une promesse que personne ne peut avoir la certitude de pouvoir tenir, et encore moins un président démonétisé.
Comme si la barque n’était pas déjà assez chargée, Emmanuel Macron s’est fendu, en marge de la COP 30 qui se tient au Brésil, d’une déclaration parfaitement ambigüe au sujet du Mercosur, ce traité de libre-échange entre l’Europe et l’Amérique du Sud, très largement rejeté par les agriculteurs français, notamment. Dans la même phrase, fidèle à son habitude de manier les contraires au nom d’un « en même temps » auquel personne ne comprend plus rien, il a réussi à glisser qu’il était « plutôt favorable » à la ratification de l’accord par la France, tout en restant vigilant sur les clauses de sauvegarde demandées par l’Union européenne. C’est précisément ce qui inquiète les éleveurs français et européens, qui ne veulent pas être sacrifiés sur l’autel de la concurrence au nom d’une libre circulation biaisée, dans un contexte de guerre commerciale voulue par Donald Trump. Le président français sera bientôt le dernier à croire à ses belles paroles et un avenir radieux.
