2005, le retour

Après les résultats du premier tour des présidentielles, j’ai l’impression de me retrouver, non pas en 2002, quand Lionel Jospin avait été éliminé de la course à l’Élysée au profit de Jean-Marie Le Pen, ou de Chirac, selon le point de vue duquel on se place, mais en 2005, lorsque nous avons été fermement conviés à adopter par référendum le projet de constitution européenne. À l’époque, l’ensemble des médias soutenait le oui, et ceux qui étaient d’un avis contraire étaient taxés d’hostilité à l’Europe. Pour certains, c’était le cas, mais non pour tous et loin de là.

Pour beaucoup d’électeurs, dont j’étais, l’Europe est une belle idée, mais pas cette Europe-là, fondée sur le libéralisme économique, une doctrine qui n’a pas cessé d’inspirer la politique européenne depuis, et qui, associée à un élargissement continu et suicidaire de son périmètre, a fini par déboucher sur un ensemble ingouvernable, dominé par des gouvernements majoritairement de droite, si ce n’est pire. Comme en 2005, la sphère politico-médiatique a pris une position presque unanime et nous sommes sommés de voter Emmanuel Macron sous peine d’être accusés de faire le jeu du Front national. Les abstentionnistes potentiels sont suspects de soutenir Marine Le Pen et de favoriser son accession au pouvoir. C’en est au point que Pierre Emmanuel Barré a vu sa chronique censurée par Nagui pour cause de désaccord éditorial sur ce point de l’abstention, et que les vives réserves de Nicole Ferroni sur les choix économiques d’Emmanuel Macron ont eu du mal à passer auprès de Patrick Cohen sur France Inter.

Je fais partie de ceux qui ont cru en 2002 que s’il existait une chance infime pour que Jean-Marie Le Pen soit élu, il fallait à tout prix apporter son suffrage à Chirac, et qu’il aurait l’élégance d’en tenir compte pour mener une politique conforme aux aspirations des 82 % ayant voté pour lui par devoir plus que par conviction. Il n’en a rien été, pas plus que lorsque les Républicains de la région Nord et de PACA ont eu besoin des voix de gauche pour être élus. Si Emmanuel Macron obtient un très haut score, il s’empressera de considérer que ses propositions sont plébiscitées et mènera une politique ultra libérale, dont la loi El Khomri ne nous a donné qu’un faible aperçu. Il confirmera la suppression annoncée des 120 000 postes de fonctionnaires et poursuivra le mouvement de démantèlement des services publics amorcé par la droite, avec qui il a l’intention de gouverner. Je ne veux pas me retrouver le 8 mai, honteux et confus, à jurer une nouvelle fois que l’on ne m’y reprendra plus.

Commentaires  

#1 poucette 27-04-2017 16:08
et pourtant....je ne suis pas sûre qu'il n'y ait pas de danger à se retrouver avec le Pen élue...ce qui serait le pire des scénarios..la seule issue possible
serait l'élection d'un parlement capable
d'imposer une autre politique.sur ce plan le PC est déjà à l'œuvre.je pense donc voter Macron
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