Tout s’achète et tout se vend

Ce n’est pas nouveau, mais cela reste à la fois un mystère et un scandale lorsque cela touche à l’intime. Un homme d’affaires de Hong-Kong vient d’acquérir la virginité d’une jeune fille roumaine de 18 ans pour la modique somme de 2,3 millions d’euros. L’initiative en est revenue à la jeune femme, mannequin de son état, qui a décidé de mettre aux enchères sa première fois, afin de se payer des études et d’acheter une maison pour ses parents.

Ma première surprise a été d’apprendre qu’il existe un site allemand, Cinderella escorts, qui organise ce genre de transactions, au vu et au su des autorités, sans que cela fasse réagir outre mesure. Bon, je ne suis pas naïf au point d’ignorer que la prostitution peut prendre des formes un peu détournées ou sournoises, telles que la fourniture de compagnie galante, où l’on feint de considérer la sexualité comme facultative et acceptée de leur plein gré par les candidates, qui ne manquent pas d’empocher des sommes généralement rondelettes, en échange de leurs faveurs. Rien à voir a priori avec les pratiques de maisons spécialisées où les filles sont à l’abattage et contraintes de faire du chiffre pour rembourser des « prêts » soi-disant consentis par des passeurs ou des « protecteurs ». Le fondement de la transaction est cependant le même dans les deux cas, et il n’y a guère qu’une différence de montant qui les sépare. Quelles que soient ses motivations, cette jeune Roumaine se prépare à consentir à une relation sexuelle tarifée, fort cher, certes, mais tarifée quand même. Je ne porterai pas de jugement sur son attitude, mais je crains qu’elle la regrette un jour.

Je m’interroge plus encore sur les motivations qui peuvent pousser un homme à payer une aussi forte somme pour le plaisir, discutable, de déflorer une femme, aussi belle soit-elle. Il me semble qu’il doit y avoir quelque chose à relier avec la sacralisation de la virginité jusqu’au mariage, prônée par certaines religions. Une sorte de mythe qui voudrait que le mari soit l’unique partenaire que cette femme ait le droit de connaître. Une grosse différence cependant, puisque dans ce cas, l’union est destinée à rester sans lendemain. Une façon, peut-être, d’affirmer à la fois sa puissance virile et sa capacité à gagner tellement d’argent qu’il peut le dilapider sans compter. Une manière, surtout, de marquer sa domination sur l’espèce féminine tout entière à travers cette femme qu’il pense ainsi soumettre. La question reste pourtant entière de savoir qui gagne et qui perd dans ce jeu ou chacun semble avoir eu comme motivation principale le fait que c’était possible. « Dire qu’il suffirait que les gens arrêtent de l’acheter pour que ça ne se vende plus », disait Coluche.