Parole, paroles…

Sans jouer les rabat-joie, force est de constater que des enfants dans une cour de récréation ont plus de respect de la parole donnée que les hommes politiques. Après avoir clamé qu’il ne serait pas candidat à l’élection présidentielle dans le cas où il serait mis en examen, François Fillon n’a rien eu de plus pressé que de se parjurer dès qu’il a senti le vent du boulet et compris qu’il serait rattrapé inexorablement par ses affaires, dont il est sans doute le seul à connaître toute l’étendue, et dont les révélations alimentent un feuilleton dont il est le premier responsable.

Si les nuages s’accumulent sur Fillon, c’est bien parce qu’il y avait matière à chercher et à trouver des irrégularités éventuelles, tout comme chez le Front national. Les journaux d’investigation se feraient un plaisir de sortir des affaires similaires sur d’autres candidats, si toutefois elles existaient. Les enfants ont une expression, un peu tombée en désuétude, pour marquer la solennité de leur engagement : « croix de bois, croix de fer, si je mens, je vais en enfer ». On disait également autrefois : « promis, craché, juré » en joignant le geste à la parole, main tendue et bouche en cul-de-poule. Pour certains, il était question de « parole de scout ». Dans tous les cas, on faisait référence à la chevalerie et au sens de l’honneur. Même les voyous respectaient leur parole et leurs engagements, sous peine de se voir traînés au ban de leur société comme des parias.

Mais, visiblement, les temps changent et les promesses n’engagent que ceux qui y croient. D’ailleurs, quand on est libéré sur parole aux États-Unis, cela s’accompagne d’un dépôt de garantie, d’une caution conséquente qui montre la relativité de la confiance accordée au présumé innocent. Quelles garanties peut-on attendre d’un candidat qui n’est même pas capable de tenir une promesse que personne ne lui demandait, mais qu’il a faite de son plein gré ? Qu’en sera-t-il de ses autres engagements, que par ailleurs je considère néfastes pour notre pays ? Je rangerai dans la même catégorie tous ces déçus de la primaire de gauche, qui se refusent à soutenir leur candidat désigné démocratiquement, quand ils ne le trahissent pas ouvertement en rejoignant la concurrence. Ils s’étaient pourtant engagés à faire la campagne du gagnant, quel qu’il soit. Ils pourront tourner cela comme ils voudront, c’est bel et bien un abandon de la parole donnée. Cela ne peut qu’alimenter la crise de confiance envers les personnels politiques, quels qu’ils soient, et apporter de l’eau au moulin du Front national, qui se prétend immunisé contre ce mal parce qu’il n’a pas exercé le pouvoir.