Qui aime mal châtie trop

Yanis, 5 ans, a été retrouvé près d’un canal dans le Pas-de-Calais à proximité d’un cabanon où vivait son beau-père, et où sa mère venait le retrouver fréquemment. Sa mort serait due aux conséquences d’une « punition » infligée par le compagnon de la mère parce qu’il avait fait pipi au lit. Malgré la température extérieure, Yanis aurait été contraint de courir plusieurs tours en pleine nuit seulement vêtu de ses sous-vêtements mouillés, pendant que son beau-père le suivait en vélo. L’enfant aurait succombé à un arrêt cardio-respiratoire à la suite d’une chute.

Il est cependant possible qu’il ait subi des violences habituelles et il aurait eu en particulier le nez cassé. Un malheureux fait-divers comme il en arrive tant, malheureusement, me direz-vous ? Peut-être, mais sa banalisation même pose question. Alors qu’il faut démontrer abondamment ses capacités à exercer un rôle parental pour être admis à devenir candidat à l’adoption, ce qui est somme toute assez logique, de nombreux parents manifestent quotidiennement leur inaptitude à s’occuper de leurs propres enfants, ou de ceux dont ils ont la charge. Contrairement à la croyance populaire, la bonne volonté ne suffit pas toujours. Nous connaissons tous le syndrome du bébé secoué. Un enfant qui hurle sans discontinuer pendant des heures, et qui a probablement de bonnes raisons de le faire, car c’est sa survie qui se joue, peut mettre les nerfs des parents à rude épreuve, certains allant même jusqu’à commettre l’irréparable pour sortir de ce cercle infernal.

Ces parents, souvent élevés eux-mêmes « à la dure » n’ont aucune conscience des limites d’un enfant et ne se rendent pas toujours compte de l’excès de sévérité dont ils font preuve. Pour certains, ils pensent de bonne foi exercer une autorité légitime dans l’intérêt futur des enfants, en leur donnant une éducation stricte avec des punitions que même des adultes supporteraient difficilement. Dans le cas de Yanis, les deux parents étaient sans profession, mais n’étaient pas connus négativement des services sociaux. La frontière entre la protection infantile et juvénile, et la liberté individuelle est parfois difficile à tracer. Certaines familles, dispersées par des décisions de justice, n’aspirent qu’à se retrouver, car les sentiments et les liens existent malgré les conditions de vie très difficiles, d’autres, comme celle de Yanis, passent entre les mailles du filet, et nous réduisent aux remords et aux regrets, ceux de ne pas avoir su voir les signes avant-coureurs du drame qui s’est joué une nuit de février 2017.