Un vieux couple

C’est celui que forment Jacques Chirac et son épouse, Bernadette, depuis 1956, soit 58 ans. Largement le temps de laisser s’éteindre les feux de la passion, à supposer qu’ils aient vraiment brûlé, l’ancien président étant plus connu pour ses frasques extra-conjugales que pour une fidélité à toute épreuve. Comme beaucoup d’épouses d’hommes politiques, Bernadette Chirac, née Chodron de Courcel, a vécu dans l’ombre de son mari, dont l’ambition dévorante l’a mené au sommet de l’état.

 

Il se murmure que l’aisance financière de Bernadette n’a pas nui à la carrière politique de Jacques, mais le couple a bien failli se séparer entre 1974 et 1976, Jacques Chirac songeant à divorcer en raison d’une liaison avec une journaliste. C’est le genre d’épreuve qui peut ressouder, mais qui peut aussi séparer définitivement un couple. Depuis que Jacques Chirac a été contraint à une retraite forcée, puis qu’il a été diminué physiquement et mentalement par la maladie, le rapport de force s’est inversé. Nous ne sommes pas dans l’intimité des Chirac, et ne souhaitons pas y pénétrer, mais il y a fort à parier que les fleurets restent mouchetés en privé. Il leur faut du public pour laisser s’exprimer leurs convictions profondes et s’affronter par personnes interposées.

C’est ainsi que Bernie a dégainé la première, en taxant Alain Juppé de froideur, et en soutenant massivement son poulain de toujours, Nicolas Sarkozy, dans sa course à la reconquête du pouvoir. La réplique de Jacques Chirac ne s’est pas fait attendre. Chacun sait qu’il n’aime pas son successeur et qu’il a même annoncé son vote en faveur de Hollande en 2012. Il s’est réjoui de l’annonce de la candidature de Juppé aux primaires de la droite et a regretté de ne pas pouvoir participer à la campagne, un exercice qu’il a toujours apprécié.

On pourrait croire que l’influence des époux Chirac a disparu avec la fonction présidentielle, mais dans ce genre de compétition, aucune carte ne peut être négligée. C’est ainsi que Juppé s’est appliqué à rappeler qu’il était toujours « le meilleur d’entre nous » aux yeux de Chirac, et que Sarkozy est prêt à tout pour arracher une réconciliation à l’ancien président, auquel il a rendu un hommage tardif, après l’avoir qualifié de roi fainéant. Une insulte que le vieil éléphant n’a sûrement pas oubliée et qu’il risque d’emporter avec lui dans le cimetière des proboscidiens.