Écriture suite et lecture

Aujourd’hui, petite réflexion sur le lien entre l’écriture et l’inconscient.

Pour la psychanalyse en général et Freud en particulier, le contenu du psychisme est un texte de nature graphique, l’appareil psychique est une machine d’écriture. L’inconscient se manifeste en particulier dans le rêve qui se manifeste dans une forêt d’écriture, dans un paysage d’écriture. L’écriture de l’inconscient permet de penser l’écriture en général. L’écriture peut permettre de comprendre les faits psychologiques, les mécanismes, les illustrer.

L’écriture automatique est une technique d’approche de cette écriture, de ce terreau d’écriture. Il s’agit dans un état de conscience modifiée d’avoir accès à l’inconscient qui dicte ce qu’il souhaite communiquer via l’écriture. L’inconscient pris comme un puits d’information, un super ordinateur avec tous ces souvenirs d’odeurs, de paysages, de goûts, on pense à la madeleine de Proust.

Cela peut être réalisé dans un état de transe hypnotique, de relaxation intense et de méditation profonde, Freud encourageait cette approche dans ses cures psychanalytiques, avec prudence, et accompagnée d’une analyse, la considérant comme une méthode efficace, mais pas suffisante pour explorer l’inconscient. (André Breton l’utilisait comme technique créative.) C’est une technique toujours pratiquée, bien qu’il n’y ait pas de preuves scientifiques, elle contribue fortement à libérer l’inconscient. En effet dans cet état la main est libre d’écrire sur le papier ce qu’il lui dictait, l’écriture devient une pensée qui s’est cristallisée en dehors de toute grammaire ou orthographe, l’inconscient est seul maître à bord.

La lettre inscrite sur le papier donne de la matérialité aux traces de la mémoire. Pour la psychanalyse l’écriture c’est un instrument d’inscription du discours de l’inconscient.

Le passage de l’écriture à la lecture se fait naturellement, car l’écriture est faite pour être lue, et qu’écriture et lecture sont 2 compétences interdépendantes liées par un même processus mental, codage, décodage des informations dans le cerveau. Ce sont en effet des pratiques langagières complexes dont il faut s’approprier les codes. Pour être écrivain, il faut être lecteur ! Les écrivains s’emparent des concepts et des méthodes psychanalytiques pour nourrir une perpétuelle quête d’une grande connaissance de soi, voire faire de l’écriture un travail contre la mort. « Le travail de création est un processus psychique analogue à celui du rêve et du travail de deuil » Didier Anzieu

« Il faut que je pratique la vie avec toute cette mort, pour dire ma vie… la meilleure façon d’y parvenir c’est l’écriture » Georges Semprun, pour exorciser ses expériences de concentration au camp de Buchenwald.

Écrire… pour tout écrivain, c’est trouver « sa chambre à soi » … pour ne pas céder à l’attraction du vide Virginia Woolf

Dans la lecture des traces laissées, on trouve une source inépuisable d’évasions, et de matières à réflexion, où notre imagination nous fait endosser des rôles, impossibles dans la vraie vie, permettant une forme de thérapie.

L’écriture, elle, reste l’outil universel pour « graver dans le marbre » les engagements, les accords, les conventions… tous textes permettant la conservation de l’histoire.

On peut écrire pour se soulager, pour être lu (on écrit toujours pour quelqu’un, pour sa mère, dit François Weyergans que Proust ne dément pas) ce quelqu’un peut être soi-même, pour le plaisir, pour partager, pour transmettre… pour diriger sa vie, pour exister, pour se faire aimer…

Écrivez, lisez, et aimez-moi !

L’invitée du dimanche