Comprends qui peut

C’est un pic ou ce n’est pas un pic ? La bataille des chiffres fait rage selon que l’on observe la moyenne des contaminations sur une semaine, plus de 360 000 par jour sur les 7 derniers, ou la valeur journalière, forcément plus fluctuante avec plus d’un demi-million de cas sur la seule journée de mardi dernier. Et encore, ces chiffres sont nécessairement sous-évalués, certaines contaminations étant « silencieuses », sans symptômes apparents. Selon des estimations, il faudrait doubler les chiffres observés pour rendre compte de la réalité. La totalité ou presque de la population française pourrait être touchée en peu de temps au rythme où vont les choses.

Et au même moment, certains pays, comme le Danemark, le Royaume-Uni ou l’Espagne, annoncent la levée prochaine des restrictions sanitaires. On ne peut interpréter ce signal autrement que l’abandon de cette forme de lutte contre le virus et l’acceptation de sa libre circulation, dans la mesure où il n’entraînerait que peu ou pas de formes graves. Certains médecins évoquent même une sorte de « vaccination » naturelle, grâce à laquelle tout le monde ou presque aurait été en contact avec le virus et aurait donc stimulé ses défenses en développant des anticorps. D’autres pays, comme Israël, expérimentent la 4e dose de vaccin, le 2e rappel, pour renforcer les défenses immunitaires chez les personnes à risques. Nous n’en sommes pas là et le gouvernement semble penser qu’il est urgent d’attendre les résultats des autres. Les décisions dans les divers pays qui vont relâcher la bride sont éminemment politiques, et c’est aussi le cas du fameux calendrier annoncé par le Premier ministre et confirmé par le porte-parole du gouvernement. Un calendrier qui tient en 2 dates, le 2 et le 16 février.

Malheureusement, le virus ne semble pas avoir compris qu’il était prié de s’y soumettre et n’en fait qu’à sa tête. Nonobstant cet entêtement des faits à refuser de se plier à l’agenda électoral, le pouvoir affirme tenir son « cap », faisant irrésistiblement penser à la fameuse tirade de Cyrano. Est-ce un pic ? Un cap ? Ou une péninsule ? Depuis le temps que le président de la République navigue à vue avec cette pandémie et qu’il « prend son risque » comme il aime à le dire en pariant sur une diminution spontanée qui lui sauverait encore une fois la mise, il n’est pas impossible que la baraka l’abandonne. Nul ne sait dans quel sens pourrait pencher l’élection si le virus décidait de s’incruster et de jouer les prolongations. Pour le moment, Emmanuel Macron semble vouloir forcer la décision pour créer les conditions de sa déclaration de candidature en laissant souffler les Français. Lui en seront-ils reconnaissants ? C’est une autre histoire.