Je ne sais rien, mais je dirai tout

J’avoue. Je porte un intérêt peut-être excessif pour les informations que l’on classe généralement dans la rubrique des « faits-divers », qui, en réalité, ne sont pas si divers que cela. La plupart du temps, on y retrouve des éléments de violence, parfois de blessures, ou plus graves encore. Comme beaucoup de Français, j’ai suivi les aventures feuilletonnesques d’un Xavier Dupont de Ligonnès, soupçonné d’avoir tué toute sa famille avant de disparaître. C’est souvent cet élément de mystère, qui, je crois, intéresse l’opinion jusqu’à la fascination parfois.

Comme tout un chacun, j’ai donc craint le pire après la disparition de cette jeune fille de 17 ans, partie faire un footing en forêt selon son habitude. D’autant plus que son père n’avait retrouvé sur son parcours habituel que sa montre GPS, son téléphone et ses écouteurs, apparemment tachés de sang. C’est le soulagement qui a dominé lorsque l’on a appris que Lisa avait été retrouvée vivante. Elle s’était réfugiée dans un restaurant à une dizaine de kilomètres de là, après avoir échappé à ses ravisseurs, apprenait-on. Elle ne portait pas de traces de blessures graves, mais elle était en état de choc. La police et la gendarmerie recherchent donc activement au moins deux personnes ainsi qu’une camionnette verte pour « enlèvement et séquestration ». Cependant, les enquêteurs semblent être sceptiques sur le récit de la jeune fille, qui est restée assez évasive, pour autant qu’on le sache, sur le signalement des ravisseurs et l’endroit où elle aurait été retenue. Le parquet de Laval ne donne qu’un minimum d’informations pour ne pas gêner l’enquête, mais l’état de choc expliquerait le manque de précisions dans le récit de l’adolescente. Ce qui domine quand même, c’est le caractère étrange dans une affaire à première vue très simple.

Aucune motivation dans ce rapt n’a été évoquée, qu’elle soit sexuelle, crapuleuse ou autre. La jeune fille n’était ni en rupture familiale, ni fugueuse, ni affabulatrice. C’était une bonne élève, bien insérée socialement, et même membre des jeunes sapeurs-pompiers. Et pourtant, un parfum de mystère entoure cette affaire, et je ne peux pas m’empêcher de penser à cet épisode du RER D en 2004, quand la France entière s’était émue d’une supposée agression antisémite à Aubervilliers. Une jeune femme de 23 ans avait porté plainte contre des agresseurs d’origine maghrébine, qui lui avaient volé son portefeuille, et lui avaient dessiné au feutre des croix gammées sur le ventre. L’histoire s’était dégonflée ensuite, après avoir fait grand bruit, soulevant une indignation commune contre des actes apparemment racistes et antisémites, lorsque la jeune femme avouera avoir monté cette affaire de toutes pièces, pour se rendre intéressante, et sans doute aussi pour attirer l’attention sur un climat général hostile aux juifs, selon elle. Ce n’est que lorsque les agresseurs de la joggeuse auront été identifiés et arrêtés que le doute sera vraiment levé.