Taisez-vous !

Taisez-vous, Alain Finkielkraut, mais taisez-vous donc ! Ce n’est pas la première fois que cette injonction revient en boomerang dans la figure du philosophe qui ne supporte pas la contradiction. Il l’avait lancée à l’encontre du scénariste Abdel Raouf Dafri en 2013, et l’avait reçue en retour en 2016 de la part d’une professeure, l’adjurant de se taire, « pour le bien de la France ». Après de multiples provocations, cette fois-ci « Finkie » a voulu mettre son grain de sel dans l’affaire Olivier Duhamel, ce qui lui a coûté sa place de chroniqueur sur LCI.

Quel est le corps du délit ? Invité par David Pujadas à s’exprimer sur les accusations d’inceste révélées par Camille Kouchner dans son livre, Alain Finkielkraut, après la figure imposée de la condamnation morale, « ce qu’il a fait est inexcusable », se lance dans une figure libre périlleuse en interrogeant le « consentement » possible de la victime, ou même « une forme de réciprocité ». Insidieusement, il reprend Pujadas qui utilise le mot d’enfant. Non, c’est un adolescent, assène-t-il, comme si cela justifiait le viol, et qu’il ignorait la définition de la minorité de 15 ans aux yeux de la loi. Il n’en est pas à son coup d’essai, mais pour la chaîne du groupe TF1 c’est la provocation de trop, et il est remercié, ce qui lui permettra de se poser en victime une fois de plus, ce qui est un comble pour quelqu’un qui se définit ironiquement lui-même comme « un mâle blanc de plus de 50 ans » et qui manie l’outrance pour faire passer le fond de sa pensée, profondément réactionnaire.

En bon philosophe qu’il souhaite paraître, Alain Finkielkraut essaye le plus souvent de s’extraire de la mêlée et voudrait chapeauter les opinions terre à terre du haut de son Olympe de réflexion inaccessible aux simples mortels. Voilà pourquoi il ne supporte pas qu’on place son discours au même niveau que celui de ses contradicteurs. Sous couvert d’un relativisme de bon aloi, il tente en réalité d’imposer une pseudo vérité totalisante, en se défendant d’appartenir à un camp plutôt qu’un autre. S’il sent que ses arguments peuvent choquer, il manie le second degré comme quand il déclarait à la télévision : « violez, violez, violez ! », croyant ainsi tourner en dérision les mouvements féministes du style Me To. Second degré ou pas, la formule est dite, et frappera inconsciemment les esprits influençables, ce qu’il ne peut ignorer. Il prétend aussi incarner la résistance au politiquement correct, ce qui est l’apanage habituel de l’extrême droite qui se veut « décomplexée ». Il ne lui reste plus qu’à stigmatiser les « droits-de-l’hommistes » pour rejoindre le camp des défenseurs de l’ordre établi, contre une bien-pensance caricaturale. Il n’est pas trop tard pour se taire.

Commentaires  

#1 jacotte 86 15-01-2021 11:38
il suffirait qu'on ne l'écoute pas pour qu'il se taise aurait dit Coluche
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