De bonnes nouvelles, hélas !

On a la nette impression que les beaux esprits qui nous gouvernent sont catastrophés de devoir nous annoncer que la situation sanitaire pourrait s’améliorer dans les jours et les semaines qui viennent. C’est par exemple Jérôme Salomon qui indique, tel Cyrano, que « le pic de l’épidémie est devant nous » pour doucher les espoirs soulevés par l’annonce d’un « frémissement » effectuée timidement par le ministre de la Santé, qui s’en excuserait presque. On a envie de lui dire : « c’est un peu court, jeune homme » et de lui rappeler que ce n’est pas qu’un pic, mais un cap ou même une péninsule…

Il est évidemment un peu tôt pour crier victoire alors que l’épidémie continue et que la situation dans de nombreux hôpitaux s’approche doucement et sûrement d’une saturation des capacités de réanimation, mais si les Français ont le sentiment que tous les efforts qui leur sont demandés ne servent à rien, il est à craindre qu’ils se détournent encore plus du chemin des sacrifices, et se disent : « perdu pour perdu, prenons du bon temps », aggravant de ce fait la contamination. Il en va de même pour le vaccin élaboré par Pfizer et BioNtech, dont les essais en cours sont très prometteurs avec une efficacité annoncée à 90 %. Si les Bourses ont salué cette promesse de bénéfices substantiels, les scientifiques ont émis immédiatement tant de bémols qu’un bécarre n’y retrouverait plus ses dièses, afin d’éviter un relâchement coupable dans les mesures de précaution imposées à la population.

Car ce qui a beaucoup changé entre le premier et le deuxième confinement en France, c’est que, paradoxalement, le fait d’être moins strict, loin de renforcer l’adhésion aux décisions gouvernementales, a, au contraire, amoindri leur acceptabilité. Chaque catégorie observe le verre à moitié plein de son voisin et concurrent, et demande à bénéficier des mêmes droits et dérogations que les plus favorisés, ce qui, en soi, est bien naturel. Plus de solidarité spontanée avec les personnels soignants, ou les professions dites de deuxième ligne. Désormais, c’est le retour au chacun pour soi, en espérant passer entre les gouttes. Le comble, c’est que ce sont les élèves eux-mêmes, pourtant pénalisés par les effets du confinement au printemps, qui ont dû réclamer des mesures sanitaires plus strictes dans les collèges et lycées, jugeant que leur sécurité et celle de leurs proches n’étaient pas suffisamment garanties. Réussiront-ils à faire suffisamment honte à leur ministre et à la classe politique qui prennent les décisions pour imposer le respect de normes de bon sens comme l’allègement des classes surchargées, réclamé bien avant l’épidémie ? Ce serait pourtant le moment de profiter de l’occasion pour revoir l’organisation structurelle de l’école, comme le réclament les enseignants en grève aujourd’hui.