Retour vers le futur

Je suis comme vous, je n’ai rien vu venir. Pourtant il y avait des indices. Dès le mois de mars, le discours officiel nous serinait que nous étions en guerre contre un ennemi invisible et donc sournois par nature. Une armée de spécialistes, de scientifiques, d’épidémiologistes et de Madame Michu nous expliquait doctement tout ce que l’on ignorait sur ce satané virus et l’inutilité d’un arsenal dont nous étions fort dépourvus. Un détail qui ne trompe pas, dès le début, le pouvoir se réunissait en conseil de défense, signe évident que nous étions bel et bien en guerre.

Et d’ailleurs, le premier confinement, dont nous ignorions alors qu’il ne serait pas le seul, voyait l’exode massif de hordes de Parisiens fuyant l’envahisseur pour se réfugier dans leurs villas huppées de La Baule pour les uns, ou chez leur grand-mère bretonne pour les autres. Certes, il n’y avait pas de Stukas volant en piqué pour mitrailler les colonnes de fuyards, mais ils n’arrivaient pas tous à la fin du voyage. Cependant, c’est lors du second confinement que l’on a vu nettement les privilégiés se ruer en zone non occupée, pour échapper aux restrictions tout en télétravaillant. Et c’est alors que s’est posée la question du ravitaillement. Dans un premier temps, le gouvernement s’est contenté de fermer certains commerces, à la tête du vendeur, à défaut de celle du client. Puis il a instauré un couvre-feu strict. Les contrevenants étaient invités à présenter leurs ausweis, délivrés au compte-goutte, sous peine d’amende. Malgré tout ça, il est resté trop de Français indisciplinés dans les rues en dépit des injonctions de Radio-Paris.

On avait déjà incité les libraires à mettre les livres au pilon, faute d’autodafés à la façon de Fahrenheit 451, on avait proscrit la culture sous toutes ses formes, il ne restait plus que la nourriture et l’instinct de conservation pour pousser les citoyens à défier les interdits et à sortir malgré les risques. Qu’à cela ne tienne, comme vous le savez, l’état a rétabli les bons vieux tickets de rationnement pour aller faire la queue au « yapadpain » ou au « yapudviande ». Moi, je ne me plains pas trop. Je fais du troc en me félicitant tous les jours d’avoir arrêté de fumer et de boire de l’alcool. Grâce à cette monnaie d’échange, je peux me siroter de temps en temps un « vrai » café à la place de cette infâme lavasse que l’on peut acheter à la coop. J’ai un peu mauvaise conscience. Je me dis que je devrais résister davantage, au lieu d’attendre que l’épidémie s’éteigne d’elle-même, comme les doryphores nazis ont fini par être éradiqués par une intervention extérieure. C’est au début qu’il aurait fallu agir contre ces lois liberticides. Si j’avais su…

Commentaires  

#1 jacotte 86 05-11-2020 14:29
maintenant tu sais... résistons un peu contre un règlement parfois idiot , emmène moi sur les bords du canal zut pour la distance, un peu d'espace!!
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