Le grand prix d’Amérique

Amis turfistes, bonjour ! Nous voici à ce moment tant attendu d’une compétition qui n’a lieu, comme les années bissextiles, que tous les quatre ans. Le favori des sondages, casaque bleue, toque poivre et sel, pas précisément un poulain de l’année, a fait toute la course en tête dans la ligne opposée. Ses partisans ont misé gros sur lui et ont pronostiqué une victoire dans un fauteuil, les sabots dans les naseaux. Juste derrière lui, un cheval de retour, casaque rouge, toque orange, l’outsider des sondeurs, dont on se demande s’il ne fait pas la course de trop et s’il ne va pas se mettre à la faute en galopant au mépris de toutes les règles.

Et c’est la dernière ligne droite ! Les candidats usent et abusent de la cravache, surtout Donald qui espère toujours coiffer son adversaire au poteau, malgré son retard. Mais que se passe-t-il ? On dirait que le canasson républicain vient de faire un coup en vache à son rival démocrate, voire un tour de cochon, en lui mordant sournoisement l’arrière-train. Hennissant de douleur, il sort de son couloir, perd un temps précieux et se fait rattraper à quelques foulées de la ligne d’arrivée. Les deux montures, Madame, Mademoiselle, Monsieur, bonsoir, sont à présent à la lutte, dans un mouchoir de poche, l’issue est indécise, le public retient son souffle tandis que Jo et Donald passent la ligne dans un galop d’enfer. Aucun des deux compétiteurs ne respecte plus aucune règle. Les juges à l’arrivée sont perplexes. Qui est passé le premier ? Faut-il disqualifier l’un, l’autre, ou même les deux candidats pour allure irrégulière ? La confusion est totale.

Il existe pourtant un moyen de départager les deux compétiteurs, et c’est la photo-finish. On peut parfois gagner d’une ou plusieurs longueurs, mais en cas de litige elle est bien commode pour voir une avance d’une encolure, d’une tête, voire d’un naseau. Mais le probable battu ne veut pas en entendre parler. « C’est bon, j’ai gagné, pas la peine de s’embêter avec ça » déclare le jockey. « Si vous ne me croyez pas, demandez à mon copain directeur des courses », « De toute façon, l’autre a forcément triché, puisque mon cheval est plus rapide que le sien. » « Je ne sais pas ce qu’il lui a donné, mais il avait l’air d’être chargé comme une mule » « Comment ça, je parle en connaissance de cause ? Je ne vous permets pas ! » Bref, nous sommes dans ce moment suspendu semblable à la proclamation du résultat d’un championnat du monde de boxe. L’arbitre tient le bras des deux adversaires tandis que le speaker énonce le verdict : il utilise soit la formule « toujours champion » soit « nouveau champion ». Nous sommes tout ouïe.

Commentaires  

#1 jacotte 86 04-11-2020 11:39
génial...
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