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L’annonce du plan de relance de l’économie, dont le Premier ministre nous affirme qu’il est prêt et archi-prêt, a dû être reportée à une date ultérieure pour faire de la place dans un calendrier gouvernemental chargé. Depuis la formation du nouvel exécutif, pas de semaine, sinon de jour, où le Premier ministre ne trouve un prétexte pour démontrer qu’il est au travail, y compris pendant les vacances, afin de compenser un « déficit d’image », comme on le dit pudiquement, en clair pour essayer de se faire connaître.

Pour l’instant, c’est loin d’être gagné. Cet homme, tout estimable qu’il soit a priori, n’imprime pas. Il fait pourtant de son mieux, en répétant chaque phrase pour bien vous la faire entrer dans la tête, mais il gâche ce bel effort en « mangeant » la répétition, comme si lui-même était impatient de passer à la suite. Combiné à son accent du Sud-ouest, cette particularité va faire le bonheur des imitateurs, un peu au chômage technique avec Édouard Philippe. Il a en commun avec son prédécesseur d’être comme l’eau plate : incolore, inodore et sans saveur. Il compense ce handicap par une activité débordante. Par exemple, il a monopolisé l’antenne de France Inter qui a bouleversé sa matinale pour lui faire de la place, ce qui ne l’a pas empêché de faire l’ouverture des travaux du MEDEF, nouvelle tribune pour passer dans les médias, tout en programmant une conférence de presse pour bien enfoncer le clou. Et ça, c’est quand il n’a rien de spécial à annoncer. On peut donc s’attendre au pire.

Ce n’est pas tout. C’est Jacques Chirac qui disait que les emmerdes volaient en escadrille. Les ministres aussi. Aux tous débuts du gouvernement Castex, ils se déplaçaient à trois sur le terrain. À présent, ils se relaient pour quadriller le territoire et passer dans les médias. C’est Jean-Michel Blanquer et sa rentrée des classes, Roselyne Bachelot qui prêche pour sa paroisse culturelle, Éric Dupont-Moretti qui répond aux critiques sur la Justice, Agnès Pannier-Runachet qui essaie d’exister dans un poste de ministre de l’Industrie créé spécialement pour elle, Olivier Véran toujours aux manettes de la Santé, ou Gérald Darmanin qui veut suivre les pas de Nicolas Sarkozy à l’Intérieur, en moins convaincant. À chaque jour suffit son ministre. Ceux que j’ai oubliés ne m’en voudront pas, ils sont trop nombreux, et les chaînes d’information continue ont beau émettre 24 heures sur 24, il faut bien faire une petite place aux broutilles internationales comme le climat insurrectionnel aux États-Unis ou les feux de forêt qui font l’actualité estivale habituellement en France. J’ai quand même une crainte : c’est que nos ministres ne tiennent pas la distance en partant sur des bases aussi élevées. Il faut quand même aller jusqu’aux élections présidentielles de 2022.