Plus on est de fous

Le haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Zeid Ra’ad Al Hussein, a conseillé au président des Philippines, Rodrigo Duterte, de se soumettre à un examen psychiatrique après ses attaques virulentes contre deux rapporteuses des Nations Unies, dont le principal tort est de contester les méthodes employées par l’autocrate envers son propre peuple. Sous prétexte de lutte contre la drogue, le président philippin tout-puissant n’hésite pas à exécuter sommairement de ses propres mains des trafiquants présumés, sans plus de formalités judiciaires. Il a sur la conscience la mort de plus de 4000 personnes tuées par la police sur de simples présomptions de vente ou d’usage de drogue.

Si les dirigeants des pays faisant partie de l’ONU devaient passer un examen de leur santé mentale pour pouvoir continuer à exercer le pouvoir, Rodrigo Duterte ne serait pas tout seul sur la sellette. On pourrait même négocier un prix de gros auprès d’un spécialiste en psychiatrie. Il aurait prochainement l’occasion de pratiquer une opération « deux pour le prix d’un » avec la rencontre programmée de deux des principaux clients potentiels d’un tel praticien. En effet, un homme qui se prend pour le dirigeant de la nation la plus puissante du monde doit négocier avec un autre aliéné qui est persuadé que son pays, la Corée du Nord, peut détruire la moitié du globe sur un simple caprice. Le lieu de l’entrevue n’a semble-t-il pas encore été choisi, mais j’espère que ce ne sera pas dans de quelconques eaux territoriales neutres. J’imagine déjà les risques : Kim et Donald sont sur un bateau, les deux tombent à l’eau. Qui a poussé l’autre ? Pourtant, Donald a déjà rencontré Rodrigo. Tout s’est très bien passé, merci. Pas l’ombre d’une critique ni aucune allusion déplacée aux droits de l’homme, rassurez-vous.

Donald, comme Kim, devrait cependant se méfier de la capacité de son adversaire à donner le change en faisant croire à sa normalité. Je repense à cette vieille blague où le supposé fou promène une brosse à dents comme si c’était un chien. Le directeur entre dans son jeu en le complimentant sur son animal. Le « fou » lui rétorque qu’il s’agit d’une vulgaire brosse à dents, avant de glisser en aparté : « on l’a bien eu, hein, Médor ? » Donald, tout comme Kim, s’applique par moment à avoir l’air normal, alors que ses décisions sont manifestement influencées par une mégalomanie galopante, à l’instar de son homologue coréen. On pourrait dire qu’ils ont tout pour s’entendre, mais il ne peut pas y avoir deux mâles alpha dans la même meute. On espère simplement qu’ils ne déclencheront pas une guerre nucléaire mondiale par inadvertance en jouant à celui qui urine le plus loin.