Le médecin malgré nous

S’il est une situation encore plus désagréable que celle occupée par Sganarelle, contraint de faire le médecin à l’insu de son plein gré, c’est bien la nôtre, patients obligés de subir le traitement que nous inflige un nouveau Diafoirus, au nom d’une science tout aussi obscure qu’au temps de Molière. Notre président médecin ne rate pas une occasion de se rendre au chevet de ses malades, il consulte, puis il rédige son ordonnance, à base de remèdes de cheval. Plus la potion est amère, meilleur est le docteur.

Notre médecin charlatan se fait assister par de vilains rapporteurs pour établir un diagnostic décidé à l’avance, qu’il justifiera en donnant des explications qui valent bien celles de Molière quand il concluait après force locutions latines fantaisistes : « Voilà justement pourquoi votre fille est muette ». La caractéristique des politiques d’aujourd’hui, comme celle des médecins du 17e siècle, est de parler une langue qu’ils sont seuls à connaître, les uns le latin, les autres un jargon incompréhensible. Les médecins de Molière en sont restés à la théorie d’Hippocrate, fondée sur les humeurs : le sang, la bile jaune, la bile noire et le phlegme et appliquent des recettes basées sur leurs croyances. Saignées, lavements, vomitifs ou purges sont remplacés par les licenciements, la déréglementation, l’application aveugle de principes libéraux au nom de théories économiques aussi peu opératoires que la médecine d’Hippocrate, dont ils ont oublié de retenir le principal enseignement : d’abord, ne pas nuire au malade.

C’est donc à notre corps défendant qu’il nous faut subir les traitements de choc de ces apprentis sorciers, qui se contentent souvent de nous demander, comme le docteur Knock, si ça nous chatouille ou si ça nous gratouille, avant d’appuyer le plus vigoureusement possible là où ça fait le plus mal. Selon notre tempérament, ou notre humeur, nous le prenons parfois avec flegme, parfois en nous faisant de la bile ou même un sang d’encre. Il arrive même que cela nous fasse piquer un coup de sang, surtout si l’on est déjà sanguin de nature. Car ce n’est pas pour rien que nous sommes considérés comme des « patients », juste bons à attendre, et spécialement aux urgences, souvent si mal nommées, que de doctes professeurs déterminent les moyens de nous sauver, y compris lorsque nous sommes en bonne santé. En effet, c’est toujours pour « sauver », qui le régime de retraite, qui la Sécurité sociale, qui la SNCF ou la poste, qu’on nous inflige des remèdes pires que le mal, au point de devoir craindre de finalement mourir guéris.

Commentaires  

#1 poucette 02-03-2018 10:52
avec le remède de cheval ou tu crèves ou tu t'en sors......;pas difficile de deviner qui va en crever et qui va s'en sortir si les luttes multiples n'arrivent pas à un rassemblement puissant.
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