Pas de précipitation !

Le dossier du projet d’aéroport à Notre Dame des Landes est en suspens depuis 54 ans. Il pourra bien attendre encore quelques semaines. Contrairement à la formule d’Henri Queuille, homme politique de la 3e et la 4e République, qu’aimait à citer Jacques Chirac, selon laquelle « il n’est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout », une décision devrait être prise avant la fin janvier. Le président Macron pourra s’appuyer sur le rapport remis hier par les trois « médiateurs » chargés d’étudier les options en présence.

Ce rapport, tant attendu, présente la particularité de ne pas choisir entre le transfert et l’agrandissement de l’aéroport actuel. Il se contente de lister les avantages et les inconvénients des deux hypothèses, leur coût, et l’impact sur l’environnement. Derrière cette apparente objectivité, les observateurs devinent un préjugé favorable pour l’extension des infrastructures existantes. Est-ce à dire que la messe est dite et que les jeux sont faits ? Je n’en suis pas persuadé. Si l’abandon du projet de transfert à Notre Dame des Landes peut renforcer l’image de défenseur de l’environnement que cherche à se donner Emmanuel Macron depuis quelque temps, il n’en est pas à une incohérence près, comme le démontre le sommet de la planète réuni à son initiative, dans lequel la France n’a annoncé aucune mesure concrète pour aller au-delà du constat. Il peut tout aussi bien affirmer son autorité en décidant le maintien du projet, pour démontrer qu’il a la capacité d’un homme d’État et qu’il sait prendre des mesures courageuses. N’oublions pas que l’opinion est favorable au transfert, à 76 % sur le territoire national et à 55 % sur le département au moment de la consultation, contestée par les opposants.

Quel que soit le choix du président, il peut s’attendre à traverser une zone de turbulences, car il mécontentera inévitablement une partie de la population. Tout dépendra de sa capacité à justifier sa décision et de sa puissance de conviction. Le point le plus délicat concernera l’évacuation de la ZAD, Zone d’Aménagement Différé, rebaptisée Zone à défendre par ses occupants, et qui me fait penser à une Zone des Opposants Obstinés, assez proche visuellement des campements de migrants du côté de Calais, connus sous le nom de « jungle ». Même si le projet devait être abandonné, on imagine mal un état de droit accepter éternellement qu’une partie du territoire soit occupé sans droits ni titres par des squatters professionnels, « bénéficiant » du concours occasionnel de casseurs, fauteurs de troubles à l’affût de bonnes causes à dévoyer de leur objet. La quadrature du cercle consistera à évacuer le périmètre en évitant un scénario catastrophe à la Sivens, avec mort d’homme.