À titre personnel

Un certain Édouard Philippe, qui se prétend Premier ministre de la France, bien que la plupart des Français sont incapables de citer son nom et encore moins de le reconnaître dans la rue ou lors de ses rares passages à la télévision, a déclaré qu’il était, « à titre personnel », favorable à l’abaissement de la vitesse maximale à 80 km/h au lieu de 90 sur les routes nationales et départementales à 2 voies, c’est-à-dire la majeure partie du réseau routier français. Ce titre « personnel » m’interroge beaucoup.

Depuis que Jupiter a daigné prendre en main les destinées de la France, les opinions et les états d’âme de ses collaborateurs, des plus proches aux plus obscurs, ne semblent pas avoir le moindre poids dans les décisions prises au nom de l’état. D’ailleurs, Édouard Philippe se retranche derrière un avis du Comité interministériel de la sécurité routière qui se tiendra en janvier et qui se fera un devoir de suivre les consignes venues d’en haut. Jusque-là, silence radio. Il ne faut surtout pas prendre le moindre risque de se mettre en porte-à-faux avec le chef tant qu’il n’aura pas fait connaître sa position. Car il est très important pour Emmanuel Macron de respecter les formes et les apparences de la démocratie, du moment que c’est lui qui tranche en dernier ressort. Ce titre personnel ressemble donc furieusement à un « mon petit doigt me l’a dit », tout en lui permettant de faire machine arrière si le chef changeait d’avis.

Le deuxième titre personnel caché par le premier comme un second train au passage à niveau, c’est celui du conducteur Édouard Philippe. Je n’ai pas entendu dire qu’il se déplace fréquemment en étant « personnellement » au volant de sa voiture depuis qu’il est Premier ministre. Est-il prêt à jurer qu’il demandera toujours à son chauffeur de respecter cette limitation de vitesse, tout comme il est censé le faire dès maintenant ? Il serait sans doute le premier Premier ministre, voire ministre tout court, à s’appliquer à lui-même la règle imposée à l’ensemble des automobilistes de notre pays. Il est facile d’édicter des règles que l’on se dispense d’appliquer soi-même. Venons-en au fond du problème, les accidents de la route. À chaque augmentation du nombre de tués sur les routes, la vitesse est la principale accusée. Quid de l’état des infrastructures routières et des fameux points noirs ? faut-il abandonner l’heure d’été, puisque l’on constate un pic d’accidents à chaque changement d’heure ? J’en passe… à titre personnel, je serais favorable à une adaptation de la vitesse admise en fonction du profil de la route, comme cela se pratique en Allemagne, sans dommage notable sur l’accidentologie. Mais qui se soucie de mon avis plus que de celui du Premier ministre ?