Pourquoi rêvons-nous pour de vrai et pour de faux ?

Pour de vrai, sur le plan neurologique, nous rêvons (comme tous les mammifères), car c’est une activité vitale qui se déroule pendant le sommeil paradoxal, pour permettre la maturation cérébrale et le développement du système nerveux. Chez l’enfant, l’activité onirique est indispensable pour sa croissance mentale et ses apprentissages. Chez l’adulte, elle sert non seulement au maintien de l’équilibre nerveux, mais aussi à l’assimilation de données nouvelles.

Pendant le sommeil, il s’efface de la mémoire des blocs d’événements inutiles, de façon à préserver les événements les plus fondamentaux de notre identité, à cet effet le rêve représente le stockage des images choisies et retenues. Il représente aussi la matrice des futurs comportements, c’est un monde virtuel qui utilise les capacités d’attention, de mémorisation, d’analyse et qui est capable de créer des situations nouvelles sans danger. C’est le désir de vie opposée à la mort !

La psychanalyse, de Freud à Lacan en passant par Jung y fait une très large place. L’étude de l’activité onirique est apparue évidente avec la notion freudienne d’inconscient individuel ou jungienne d’inconscient collectif. En effet, rêver est une activité sur laquelle nous n’avons pas de contrôle et qui puise largement dans des événements réels s’exprimant par des symboles dont on cherche le sens caché. Son décryptage est d’autant plus difficile que les événements qui se déroulent pendant le rêve et les images qui sont associées se construisent par associations libres, par des censures, par des déplacements de symboles ou par condensation*.

On cherche à travers le contenu manifeste à retrouver le contenu latent qui, pour Freud, est indéchiffrable sans l’histoire personnelle du rêveur. Ce serait en quelque sorte un langage authentique qui délivre des messages de l’inconscient vers le conscient pour nous aider, soit à faire ressurgir le refoulé à un moment où nous sommes capables de l’affronter, ou au contraire à enfouir l’insoutenable sous forme de symboles. Quand, au réveil, on se souvient de nos rêves, leur sens est souvent déroutant, leur contenu étrange, bien que parfois très réaliste, on en attend une interprétation qui revient à se pencher sur une part obscure et importante de nous-mêmes.

Pour de faux, bizarre que la même activité soit ramenée dans le réel ! Puisque c’est une activité à ce moment-là consciente, le point commun avec celle du sommeil, c’est que souvent cela consiste à laisser sa pensée vagabonder au gré d’associations d’idées, ou de souvenirs… on peut « Rêver aux anges » « rêver sa vie » « prendre ses rêves pour la réalité », mais aussi échafauder un avenir, construire des projets, au nom d’une vérité idéale, faisant fi de la triste réalité, et à ce titre-là, rêver éveillé est tout aussi indispensable que l’activité nocturne, car elle permet l’utopie qui cultive l’espoir de rester créatifs et combatifs pour faire front au cauchemar (vous savez ces rêves si dérangeants qu’ils vous réveillent) d’une humanité qui se dégrade.

 

*À lire ou relire « l’interprétation des rêves » Freud et « sur l’interprétation des rêves » Jung.

L’invitée du dimanche