Tristes tropiques

Je dégustais tranquillement mon Bagnagna hier matin quand j’ai entendu une nouvelle qui m’a fait sursauter, tout comme vous, peut-être. Une tempête tropicale menaçait les côtes bretonnes. Tropicale ? En Bretagne ? Mes maigres souvenirs de géographie me rappelaient que, selon la formule d’un de mes brillants professeurs, la France était située « à peu près exactement » entre le pôle et l’équateur. De là à imaginer que notre continent avait dérivé jusqu’au tropique, et d’ailleurs lequel ? Il y a un monde. Ôtez-moi d’un doute. Il n’y a toujours que deux tropiques ?

Le tropique du Cancer au nord et le tropique du Capricorne au sud, c’est bien ça ? Et le tropique du Cancer passe toujours en Floride, au Sénégal, en Arabie saoudite, en Inde, notamment ? Rassurez-moi, ça n’a pas changé ? Je préfère me renseigner, parce qu’on nous fait tellement de changements sans même nous prévenir que je suis un peu échaudé. Pour moi, les tropiques, ce sont les cocotiers, les palmiers et la baignade à 26 degrés sous un soleil de plomb (exactement !) plutôt que le kouign-amann, les crêpes et le crachin breton. Et la musique tropicale, c’est celle qui permet à Bernard Lavilliers de défendre ses causes perdues, sans la moindre incursion de biniou ou de bombarde, que je sache. Mais ça, c’était peut-être avant. Avant que le climat se détériore durablement.

Autrefois, on accusait la bombe atomique de dérégler le rythme des saisons, ma pauv' dame. Et en 1980, Jean-Pierre Ferland chantait déjà dans une chanson prémonitoire : « il a neigé à Port-au-Prince ». De nos jours, chacun sait, à part quelques indécrottables parmi lesquels le président des États-Unis, que le réchauffement climatique, dont l’homme est le principal responsable, amène déjà et amènera toujours plus d’évènements climatiques insolites et exceptionnels. Renseignements pris, la tempête Ophélia, grâce principalement à l’action déterminée et courageuse du Président Macron, et un peu à celle de l’anticyclone des Açores, va faire un crochet vers l’Irlande et épargner la Bretagne, qui a déjà suffisamment à faire avec son bas clergé. C’est un répit bienvenu, mais je m’attends désormais à tout. Par exemple, à ce qu’il pleuve des chats et des chiens, comme disaient nos anciens amis britanniques avant de quitter l’Union européenne, ou même des grenouilles et des crapauds comme dans le film Magnolia, en référence à une des dix plaies qui frappèrent l’Égypte pour obliger le pharaon à laisser partir les Juifs. Tout ça parce que, tout comme les Dieux, les hommes sont tombés sur la tête et massacrent la seule planète dont ils disposent. Si c’est pas malheureux !