Enfumage

Nous connaissons désormais les grandes lignes du budget pour l’année 2018 qui a été dévoilé en conseil des ministres. N’en déplaise à la majorité qui soutient Emmanuel Macron, sa caractéristique principale est de servir les riches en prenant aux pauvres. C’est la logique imparable qui ressort des chiffres et toute l’énergie des communicants va être mise au service de la dissimulation de cette évidence. Comme pour la réforme du Code du travail, les mauvaises nouvelles sont pour tout de suite, tandis que les bonnes, si elles arrivent, sont remises à un avenir incertain.

Une des mesures emblématiques de ce budget, c’est la transformation de l’impôt sur la fortune en impôt sur la fortune immobilière, ce qui, couplé à une refonte de la taxe sur les revenus du capital, fera perdre à l’état 4,5 milliards d’Euros. Et c’est là que l’on crée une fausse polémique sur le maintien de la taxation des « signes extérieurs de richesse » rebaptisés « produits de luxe » tels que les yachts, les jets privés ou les lingots d’or, sans oublier les chevaux de course. Si les députés de la majorité obtiennent cette concession du gouvernement, ils pourront se targuer d’avoir défendu les intérêts des « pauvres » alors que l’injustice la plus criante subsistera et justifiera l’épithète insultante de président des riches, méritée par Emmanuel Macron. C’est en braquant les projecteurs sur des épiphénomènes que le pouvoir espère détourner l’attention des mesures les plus scandaleuses contenues dans ce projet de budget.

Le Président a l’intention de devenir le bon élève de la classe européenne, comme il l’a toujours été dans sa propre scolarité. Pour cela, il faut réduire le déficit, non seulement au-dessous des 3 % du PIB, mais tendre à l’équilibre budgétaire. Il veut également faire des cadeaux aux 10 % les plus riches qui ont favorisé son accession au pouvoir, et donner quelques miettes aux nécessiteux, le tout sans augmenter les impôts et même en les diminuant. La recette est connue, c’est celle pratiquée par les libéraux américains, qui réduisent considérablement le rôle de l’état quand ils sont au pouvoir, laissant l’initiative privée assumer les fonctions régaliennes, quitte à augmenter significativement les inégalités sociales. Pour financer les baisses d’impôts, Emmanuel Macron veut donc tailler dans les dépenses liées au logement social, diminuer les remboursements de la Sécurité sociale, baisser les dotations aux collectivités locales et supprimer un maximum d’emplois aidés. Ce sont les sources les plus importantes, mais il ne dédaignera pas non plus de faire les poches aux fonctionnaires, aux retraités ou aux automobilistes sous couleur d’écologie. Pendant que les députés discuteront des détails, il espère faire oublier ses choix désastreux dont l’efficacité n’est même pas démontrée.