Il était une bergère

Vous connaissez la chanson. La fameuse bergère qui allait au marché ressemble un peu à Emmanuel Macron. Il porte sur la tête les trois pommes qui représentent les espoirs des Français, enfin ceux qui restent convaincus qu’il peut en même temps raser gratis demain et redresser les comptes aujourd’hui, et qui sont de moins en moins nombreux si l’on en juge par le nouveau sondage qui lui donne seulement 36 % d’opinions favorables. Pour beaucoup de nos concitoyens, la ligne de conduite du gouvernement est complètement illisible et contradictoire : « Trois pas en avant, trois pas en arrière, trois pas sur le côté, trois pas de l’autre côté ! »

Prenons par exemple le budget de l’armée. Macron a promis de l’augmenter pour le porter à 2 % au terme de son quinquennat, et sa première mesure consiste à raboter les dépenses militaires pour 2017. Trois pas en avant, trois pas en arrière. Même stratégie concernant les dotations aux collectivités locales, que l’on baisse immédiatement pour mieux les stabiliser ensuite, parait-il. On comprend la méfiance des élus locaux, habitués à faire les frais des restrictions budgétaires. Concernant les pas de côté, notons le cafouillage sur la taxe d’habitation, avec sa réforme annoncée, puis reportée avant d’être maintenue. On peut ranger dans la même catégorie le flou savamment entretenu sur le contenu des ordonnances sur la réforme du Code du travail dans le but évident de mettre le pays devant le fait accompli à la rentrée. Même valse-hésitation sur les APL, dont la baisse a été « une connerie sans nom », de l’aveu même du chef de l’état, qui admet ainsi implicitement que son autorité est bafouée par ses propres collaborateurs.

Avec un dévissage aussi spectaculaire, on se demande jusqu’où peut descendre la popularité du chef de l’état. Pourra-t-il battre le record de François Hollande qui a touché le fond avec 11 % d’opinions favorables fin 2016 ? Ces cinq années risquent de paraitre bien longues aux Français, dont les dernières illusions semblent en train de disparaitre, mais elles seront très courtes pour l’opposition, laminée par la vague de fond électorale, désertée par les militants, exsangue financièrement. Ce sera très dur notamment pour le Parti socialiste, qui vit peut-être ses derniers mois sous ce nom-là et dans ses locaux de la rue de Solferino, promis à la vente pour sauver les meubles, ou ce qu’il en reste. Il reste un peu moins de 5 ans pour refonder une gauche sur des bases idéologiques plus claires, en se démarquant de la social-démocratie et de ses tentations droitières, dont Emmanuel Macron est un avatar. Ce ne sera pas de trop.