Tout nouveau tout beau

Le vieux monde était derrière nous. Une nouvelle façon de faire de la politique nous tendait les bras. Le Modem de François Bayrou avait posé comme condition à son ralliement, pardon, à son soutien à Emmanuel Macron, le messie de la nouvelle religion qui lave plus blanc que blanc, de donner un coup de balai et de moraliser la vie politique. Si je me souviens bien, la proclamation du nouveau gouvernement avait été retardée pour permettre les vérifications nécessaires des états de service des futurs ministrables. À ce compte-là, le remaniement devrait prendre beaucoup plus de temps que prévu initialement.

D’ores et déjà, deux ministres sont passés par pertes et profits, sans qu’il soit bien clair que leur démission soit spontanée comme le prétend l’intéressée pour le ministère de la Défense, ou provoquée dans le cas de Richard Ferrand, qui semble avoir été poussé vers la sortie pour désamorcer les conséquences des soupçons pesant sur lui. On cherche en vain un semblant de logique dans ce fatras de décisions contradictoires. Jusqu’à présent, la règle voulait qu’un ministre mis en examen dût démissionner, mais qu’il pouvait se maintenir dans le cas contraire. De même, un ministre battu devait quitter son poste. En pratique la règle est appliquée ou pas, c’est selon. Si Sylvie Goulard quitte le ministère de la Défense pour des soupçons d’emplois fictifs au Modem, on comprend mal pourquoi François Bayrou et Marielle de Sarnez n’en feraient pas autant. Et aussi, qui en décide ? Un ministre peut-il jeter l’éponge de son propre chef au bout d’un mois sans un motif sérieux ? Ne devrait-on pas établir un droit de licenciement des ministres au lieu de feindre d’accepter leur démission, même quand il est patent que ce n’est pas leur choix ? Et que se passerait-il si un ministre, s’estimant dans son bon droit, refusait de présenter sa démission ?

Je ne serais pas surpris que l’annonce du nouveau gouvernement soit repoussée d’un jour ou deux, le temps de négocier des accords ou de débaucher quelques personnalités, ointes du saint chrême de la nouveauté, même si elles ont blanchi sous le harnois à la manière d’un Raffarin. En tout état de cause, aucune nomination ne devrait jamais intervenir avant la publication du numéro du Canard enchaîné. Je pense qu’il serait plus efficace d’interroger les journalistes spécialisés sur les casseroles dont ils disposent sur les ministrables pressentis. Les intéressés sont parfois les plus mauvais juges de leur propre situation. François Fillon avait rassuré son entourage avant d’être candidat, persuadé que rien ne pouvait être sorti contre lui. On a vu ce qu’il en a été. Mais ça, c’était avant…

 

Edit : ce billet écrit hier soir est déjà dépassé par les évènements avec le départ « spontané » de François Bayrou et Marielle de Sarnez : cours, camarade, le vieux monde est derrière toi !