Un malentendu sexuel

Voilà l’expression malheureuse utilisée pour sa défense par un ancien policier des Yvelines, accusé de viol sur une femme placée en cellule de dégrisement au commissariat. Au-delà de la formule dont le ridicule le dispute à l’ignominie, la situation est exemplaire d’un certain nombre de clichés qui accompagnent régulièrement les plaintes pour rapports sexuels forcés.

 

La notion même de malentendu repose sur l’idée que les femmes seraient des nymphomanes et des obsédées sexuelles qui n’auraient en tête que l’intention ou l’espoir d’accéder à des relations sexuelles avec tout individu de sexe masculin, et particulièrement les violeurs, objets de toutes leurs assiduités. Ces malheureux n’étant que des êtres fragiles, faits de chair et de sang, ils ne peuvent résister longtemps aux sollicitations plus ou moins explicites des hystériques qui les pourchassent. Il arrive même que des femmes poussent la provocation jusqu’à porter des jupes et parfois des talons dans le but avoué de les séduire. C’est d’ailleurs par esprit de justice que ces hommes mettent un point d’honneur à violer également celles qui se contentent de mettre un jogging informe pour faire leur promenade quotidienne.

Coluche en avait fait un sketch, dans lequel il expliquait que le viol, c’est quand on ne veut pas, et que lui, il voulait. D’où le malentendu. Bizarrement, la Cour a jugé que la victime ne pouvait pas être consentante, dans la mesure où elle était ivre, que l’alcool altérait son jugement et qu’elle était soumise à l’autorité d’une personne en uniforme dans le cadre d’un enfermement. Ce qui l’a amenée à prononcer une peine de 10 ans d’emprisonnement sur les 20 que pouvait encourir l’accusé. En dehors des faits de viol, on reste perplexe sur la conscience professionnelle qui pourrait conduire un fonctionnaire de police à consommer des relations sexuelles sur son lieu de travail, même si elles avaient été consenties.

Et ce, d’autant plus que l’homme était un policier chevronné, selon les mots de l’avocat général, qui y voyait un motif pour la Cour d’être « plus sévère que d’habitude ». Une expression aussi hasardeuse que celle de l’accusé, car laissant planer un doute sur le laxisme possible de la juridiction. Les mots ont un sens, y compris dans les prétoires.