Le charme discret de la bourgeoisie

Si Luis Buñuel ou Claude Chabrol avaient pu assister à la réunion des riverains du Bois de Boulogne et heureux habitants, pardon, résidents, du très huppé 16e arrondissement de Paris, nul doute qu’ils auraient pris des notes pour émailler un prochain film sur leur cible favorite, la petite bourgeoisie, de citations prises sur le vif. La rencontre avait lieu dans un amphi de la fac Dauphine et elle opposait la secrétaire générale de la préfecture d’île de France, venue présenter le projet de construction d’une cité d’accueil provisoire, aux habitants déchainés rameutés par le maire d’arrondissement Les républicains, Claude Goasguen.

J’espère que les enfants de ces citoyens exemplaires ne tomberont jamais sur des images d’archives de leurs parents en train d’invectiver les « bolcheviques », suppôts de la maire Anne Hidalgo, soupçonnée de vouloir livrer le quartier à la racaille, à grand renfort de « salope » et de doigts d’honneur. Ils auraient une bien piètre image de ces bons bourgeois tout à coup transformés en hyènes hurlantes à l’idée que des intrus puissent respirer le même air qu’eux. Le crime de la mairie de Paris ? Offrir 200 places d’hébergement d’urgence aux SDF, comme dans presque tous les autres arrondissements de la capitale. Rien de personnel contre les SDF, les riverains se sont déjà opposés à l’accueil de réfugiés ou de migrants, ils ont protesté contre un projet de village d’insertion de Roms, ils sont hostiles à l’installation du cirque Romanes dans le square Parodi et ils ne veulent pas de logements sociaux avenue Foch. En gros, ils veulent rester dans un entre-soi bien confortable et ils ne manquent pas d’arguments.

Pour les plus faux-culs, l’enjeu serait écologique : il faut préserver l’espace naturel du Bois de Boulogne et n’y accepter aucune construction, même provisoire. Voilà des zadistes d’un genre nouveau. Pour d’autres, c’est dans l’intérêt même des populations défavorisées de ne pas les exposer à l’envie en leur faisant côtoyer les riches, dont ils n’auront jamais le niveau de vie. Et puis, ces gens-là seront bien mieux ailleurs. Chez eux, s’ils en ont un, ou n’importe où, dans le désert par exemple. Bien sûr, on évoque à demi-mot les nuisances qu’ils pourraient occasionner : le chapardage et même le viol en amalgamant joyeusement vols de poule et agressions survenues à Cologne à la Saint Sylvestre. Sans compter le bruit et l’odeur, aurait ajouté l’ex-président Chirac. Mais le pire de tout, c’est la baisse de l’immobilier qui toucherait le quartier s’il devenait aussi mal famé. On ne rigole pas avec le pognon.

Commentaires  

#2 poucette 17-03-2016 18:12
c'est finalement une piqure de rappel de ce qu'est réellement cette bourgeoisie Monique pinçon -Charlot qui les connait bien n'avait jamais vu une telle haine de classe s'exprimer aussi librement.
Citer
#1 jacotte 86 17-03-2016 10:58
mais on peut rigoler avec le registre d'injures de ces gens si biens élevés, pour ma part je m'en réserve la meilleure , et ne venez pas me chercher des poux dans la tête, ou je vous traiterez de "brosse à caca" na!!!
Citer