À la queue comme tout le monde !
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 29 janvier 2024 10:42
- Écrit par Claude Séné
L’art de la resquille, c’est bien connu, est un sport national pour les Français, pratiqué dans toutes les files d’attente du pays à toutes occasions. Au moment où les agriculteurs ont annoncé leur intention de bloquer le pays, et en particulier les lieux de pouvoir que représentent l’Élysée ou le marché international de Rungis, on peut s’interroger sur le bien-fondé du lieu et du moment choisi par les taxis pour faire entendre leurs propres revendications. Les taxis veulent en effet renégocier les conditions de rémunération des transports pris en charge par la Sécurité sociale, qu’ils estiment insuffisante.
Si bien que les difficultés de circulation imputables aux blocages routiers des agriculteurs en colère vont être amplifiées par les « opérations escargot » organisées autour de grandes villes telles que Paris, Marseille ou Bordeaux. On peut émettre deux hypothèses à ce sujet : soit les blocages vont s’amplifier et se nourrir mutuellement, avec le risque d’un engorgement massif du pays, soit les intérêts contradictoires des protagonistes pourraient entraîner une confusion telle qu’un retour à l’ordre serait rendu inévitable. Car les professions en difficulté sont actuellement légion, notamment dans le secteur public. On a beaucoup parlé dernièrement des bourdes de la nouvelle ministre de l’Éducation, en oubliant les difficultés subies sur le terrain par les acteurs, élèves, profs, familles, qui ne trouvent pas de lignes claires pour un avenir meilleur. Que dire aussi de la situation à l’hôpital, en sous-effectif chronique, dont les conditions d’accueil des patients se sont dégradées massivement, en particulier dans les services d’urgence, où l’on peut mourir dans un couloir faute de soins ? Et la liste n’est pas exhaustive.
La tentation est grande de profiter du capital de sympathie généré par le mouvement des agriculteurs, soutenu par 89 % de la population, pour rappeler des revendications, balayées d’un revers de main par un pouvoir arrogant, telles que le recul de l’âge de la retraite, dans ce qu’il est convenu d’appeler la convergence des luttes, souvent évoquée, très rarement réalisée. D’autant plus que l’appareil répressif, qui reste mobilisé pour le cas où la situation dégénérerait, est mis résolument en retrait, afin de ne pas provoquer des troubles à l’ordre public qui rendraient inévitable sa mise en œuvre. On a rarement vu un ministre de l’Intérieur aussi conciliant et modéré dans ses propos, alors qu’intérieurement il doit bouillir et prier pour qu’un incident fortuit ne vienne pas gripper la belle machine et mettre le feu aux poudres. Pour l’instant, les forces de l’ordre déroulent le tapis rouge devant les manifestants qui ont programmé un véritable siège à Paris. Tant que les forces en présence s’accorderont sur les sites autorisés ou interdits, le système peut tenir. Il restera cependant à engager de véritables négociations pour trouver une sortie honorable à ce conflit.
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