Amateurisme et copinage

L’actualité climatique et météorologique a relégué provisoirement au second plan la situation en Ukraine. Il faut reconnaître à LCI une certaine constance dans le traitement de la guerre consécutive à l’invasion russe sur le territoire ukrainien. Tous les soirs, la chaîne invite des spécialistes de la question dans un débat contradictoire, où le point de vue ukrainien est toujours représenté. Une exception toutefois avant-hier quand il s’est agi de commenter, non pas la guerre elle-même, mais la décision surprenante de Volodymyr Zelenski, le président ukrainien, de mettre fin aux fonctions de deux de ses proches à des postes clés de l’appareil d’état.

II a ainsi limogé la procureure générale du pays, qui enquêtait sur les crimes de guerre commis par l’armée russe en Ukraine, notamment à Boutcha, et le chef des services de sécurité, qui n’est autre qu’un ami d’enfance du président. L’une comme l’autre est convaincue d’avoir laissé ses services livrés à la trahison ou à la collaboration avec l’envahisseur russe. Curieusement, les experts et commentateurs de la situation en Ukraine n’ont pas vu dans cette décision une façon courageuse de reprendre en main l’appareil d’état, mais un aveu de faiblesse. Comme on peut le voir parfois, ces grands fauves habituellement en rivalité pour faire valoir leur point de vue, sont tombés d’accord pour y déceler des preuves de l’amateurisme du président Zelenski, qui, au fond, les dérange parce qu’il ne fait pas partie du sérail, et sape les fondements d’une société bien ordonnée dans laquelle les parcours politiques sont bien balisés. Volodymyr Zelenski a bluffé tout le monde en endossant le tee-shirt du chef de guerre et en faisant le job quand beaucoup de dirigeants « légitimes » tergiversent et procrastinent. Les journalistes de LCI, encouragés mutuellement, ont donc chassé en meute et dénoncé le copinage qui a abouti à nommer des personnages incompétents du seul fait de leur proximité avec le président.

Personnellement, je n’ai pas trouvé que la situation en Ukraine, mis à part les circonstances particulières du conflit avec la Russie, soit si différente de ce qui peut se produire en France par exemple. Les hommes du président sont partout. Alexandre Benalla a été soutenu contre vents et marées par Emmanuel Macron, au risque de discréditer l’état lui-même et de faire vaciller le pouvoir. Et qui peut dire que les portefeuilles ministériels n’ont jamais été attribués qu’en fonction des compétences techniques de ceux qui les ont reçus ? Quand il s’agit de remplacer le préfet de police de Paris, Didier Lallement, tristement célèbre pour ses errements et sa doctrine du maintien de l’ordre, qui a dépassé la limite d’âge de 65 ans, on pense immédiatement à nommer Laurent Nuñez, parce qu’il est considéré comme proche du président. On remarquera que tous ces soutiens de la première heure ont reçu la juste récompense de leur engagement et la plupart sont encore en poste.