Chauvinisme

Vous me connaissez. Je ne suis pas du genre à voir systématiquement le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. À pratiquer quotidiennement un optimisme béat ou à m’extasier sur les qualités de mes compatriotes, que j’écris cependant en un seul mot, il ne faut pas exagérer quand même ! Loin de moi de faire preuve d’un esprit de clocher, cocardier, voire cocoriquiste. Comme l’oncle Georges (Brassens, bien entendu), le matin du 14 juillet je reste dans mon lit douillet et je ne confonds pas patriotisme avec nationalisme.

Cependant, je l’avoue, les incendies catastrophiques qui ont fait plus de 80 morts en Grèce récemment m’ont fait toucher du doigt la chance que nous avons d’habiter un pays où ce genre de cataclysme est presque inimaginable. Non que nous soyons immunisés contre les incendies, qui font malheureusement encore des ravages dans les régions les plus chaudes, mais parce que les services de lutte contre le feu et l’organisation de la protection civile ont fait des progrès considérables. Je me souviens qu’étant enfant l’annonce des feux de forêt en Corse ou dans le sud de la France faisait partie des « marronniers » qui rythmaient le cours des saisons et appartenait aux nouvelles estivales incontournables. D’une année sur l’autre, on mesurait l’étendue des dégâts en calculant le nombre d’hectares partis en fumée. Une partie de ces incendies était d’ailleurs volontaire, l’écobuage restant une méthode traditionnelle de fertilisation et de défrichement dans certaines zones du territoire. Cette pratique appartient désormais au passé et la réglementation en a pratiquement éradiqué l’usage.

La région de Grèce touchée par l’incendie meurtrier avait fait l’objet d’une urbanisation excessive et anarchique dans une zone manifestement à risque, et c’est une des causes de la catastrophe. Quand on sait à quel point le débroussaillage autour des maisons a contribué à réduire la survenance et la dangerosité des feux dans le sud de la France, on mesure combien le laisser-faire généralisé et le manque d’état en Grèce depuis des décennies a pu faire prendre des risques inconsidérés. Si, en France, la lutte contre le feu a pu progresser, c’est bien grâce à la prévention, avec l’interdiction des barbecues et les appels à la vigilance sur les cigarettes mal éteintes, et aussi par l’organisation des moyens en pré positionnant les véhicules et les hommes et en surveillant activement les moindres signes dans les régions à risque. Enfin, des plans sont établis permettant l’évacuation des personnes en cas de besoin, évitant ainsi cette pagaille meurtrière qui a sévi en Grèce et n’a pas permis de sauver des vies par dizaines. Une situation inconcevable en France, qui est souvent amenée à conseiller d’autres pays ou à leur prêter main-forte. Alors, oui, pour une fois, cocorico !