Ça va Manu ?
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 19 juin 2018 10:29
- Écrit par Claude Séné
Les chevilles ? Pas trop enflées ? Le melon ? Bien à sa place, au-dessus du cou ? Emmanuel Macron a tancé vertement un collégien qui s’était permis de l’appeler par ce diminutif somme toute assez innocent. Il n’a fait qu’une bouchée de son adversaire d’un jour, dont la valeur attendra le nombre des années, sans tenir compte de l’adage qui veut qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Il est comme ça, Manu. S’il peut piétiner un contradicteur, aussi infime soit-il, il n’hésite pas, il y va franchement.
Cet incident m’a rappelé la passe d’armes rapportée fréquemment entre François Mitterrand et un militant qui lui demandait la permission de le tutoyer. Le président lui aurait répondu, glacial, « si vous voulez », ce qui était néanmoins une façon de le traiter d’égal à égal. Alors que dans sa réplique, Emmanuel Macron tutoie le collégien, accentuant ainsi le caractère hiérarchique de leur relation et se mettant au niveau d’une familiarité inégalitaire. Cette finesse de Mitterrand, qui s’est démontrée aussi dans le débat avec Chirac quand il lui lançait « vous avez tout à fait raison, Monsieur le premier Ministre », Macron en est très loin. La meilleure façon d’obtenir le respect auquel sa fonction peut lui donner droit n’aurait-il pas été de le pratiquer lui-même, en vouvoyant son interlocuteur, malgré son jeune âge ? j’ai souvenir d’une discussion avec des élèves d’un quartier défavorisé, où ils estimaient parfaitement incongrue la notion même selon laquelle leurs enseignants se faisaient un point d’honneur de les respecter. Pour eux, le respect ne pouvait exister que dans le sens du plus faible à l’égard du plus fort. Le comportement d’adultes tels que Macron ne peut que les conforter dans cette conviction.
Non content de cette leçon de civisme inversé, le président s’est cru obligé d’en remettre une couche sur sa conception de la société. Le jeune homme ayant fredonné le début de l’internationale, il lui a donné un cours de révolution à sa sauce. Selon lui, pour obtenir le droit de faire la révolution, il faut d’abord faire des études, avoir un bon job, gagner sa vie, être propre sur soi et porter un costard. Son portrait craché en somme. Pour quelqu’un qui proclame que le pouvoir ne se donne pas, mais qu’il se prend, voilà une conception bien aristocratique des relations sociales. Dans une chanson, Renaud apostrophe un copain en ces termes : « déconne-pas, Manu, déconne pas ! ». C’est également lui qui s’adressait familièrement à Mitterrand en l’appelant « tonton », sans que celui-ci en prenne ombrage. Mais « Manu » a choisi son camp et depuis longtemps.
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