L’art du titre

Cela aurait pu s’appeler : satisfait ou remboursé. Ce serait alors un titre dit « incitatif », un de ceux qui sont supposés piquer la curiosité du lecteur et l’amener à poursuivre et à prendre connaissance du sujet proprement dit. Le risque est évidemment que celui-ci passe à autre chose et passe donc à côté de l’information. L’autre méthode consiste à tenter de résumer toute l’histoire dans un titre explicatif. Mais un bon titre doit faire appel aux deux procédés, pour tenter de capter l’œil et l’attention et les conserver le plus longtemps possible.

Le fait-diversier de 24 matins.fr a bien fait son travail en titrant, je cite : « Lyon : le client mineur d’une escort-girl la braque, déçu de sa prestation ». Tout y est, et l’on a cependant envie d’en savoir plus. À vrai dire, on ressort de la lecture de l’article avec plus de questions que de réponses. Ce jeune homme de 17 ans était-il en situation de misère sexuelle telle qu’il ait cru devoir faire appel aux services d’une professionnelle ? Ou bien sa « déception », dont on ignore la nature, était-elle un prétexte pour une extorsion de fonds ? Même si l’arme utilisée était factice, on peut le soupçonner d’avoir prémédité son geste. De plus, ce garçon ne s’est pas contenté de récupérer sa mise, ce qui est déjà malhonnête dans la mesure où il semble avoir obtenu une satisfaction partielle et que sa prestataire de service n’est pas tenue à une obligation de résultat, mais il a également empoché la recette de la soirée de cette escort-girl, ainsi que celle de sa colocataire avec qui elle partageait l’appartement, pour les mêmes activités.

Par ailleurs, ce fait-divers pourrait faire jurisprudence. Faudra-t-il établir un cahier des charges pour garantir la qualité des prestations des travailleurs du sexe ? À partir de quand pourra-t-on invoquer une tromperie sur les qualités substantielles du produit ? Est-ce que les fonctionnaires de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes seront habilités à effectuer des contrôles pour vérifier la conformité des transactions commerciales ? Autant de questions sans réponses sur un sujet certes épineux. Les formes de la prostitution, considérée comme « le plus vieux métier du monde » ont évolué. Les prostituées sont appelées escortes et le racolage est devenu virtuel en utilisant Internet, mais le principe reste le même. Il s’agit toujours d’échanger des faveurs sexuelles contre espèces sonnantes et trébuchantes. L’histoire ne dit pas si les victimes de l’extorsion étaient indépendantes ou sous la coupe d’individus ou de réseaux organisés, mais l’incident soulève plus d’interrogations qu’il n’y parait. Car un bon titre doit toujours s’appuyer sur une question ouverte.

Commentaires  

#1 poucette 27-12-2017 15:10
je trouve que tu donnes dans le grivois et que ta réputation de sérieux va en prendre un bon coup....bonne année quand même bises poucette
Citer