Pas cher payé

Pour vivre heureux, vivons cachés. Les déclarations qualifiées de « maladroites » par le président Macron de sa ministre de la jeunesse, des sports et des Jeux olympiques, nouvellement chargée de la lourde tâche de gérer l’éducation nationale à ses moments perdus, ont eu pour effet collatéral d’attirer l’attention sur la personne d’Amélie Oudéa-Castéra. Et l’on est allé de surprises en surprises. D’abord sur ses manières d’instrumentaliser l’institution scolaire. Autrefois en faisant pression pour faire sauter une classe de maternelle à l’aîné de ses enfants, puis récemment pour lui permettre d’être admis dans une classe prestigieuse de « prépa ».

Puis nous avons été informés des salaires qu’elle a touchés dans un passé pas très lointain, quand elle dirigeait la Fédération française de tennis, et que les adhérents s’étonnaient déjà des montants de sa rémunération. Rien d’illégal ni de secret en cela, puisque les ministres sont tenus de déclarer leurs salaires et leur patrimoine, mais une publicité malheureuse au moment où AOC révélait sa préférence pour une école privée élitiste, en déclarant qu’elle seule permettait aux enfants de s’épanouir, d’être heureux et de se faire des amis, sans souffrir d’un non-remplacement des professeurs, un mal récurrent dont on ignore comment elle entend le résoudre, alors que ses amis de l’ex-majorité y ont échoué. Amélie Oudéa-Castéra touchait donc 500 000 euros par an à la tête de la FFT, ce qu’elle considérait comme un sacrifice financier par rapport au million et demi qu’elle percevait antérieurement en qualité de directrice exécutive chez Carrefour. Ce n’est pas un délit d’être grassement rémunéré, mais le meilleur est à venir.

AOC a expliqué benoîtement aux instances de la FFT qu’elle le faisait « par amour du sport », et que, considérant qu’elle y consacrait tout son temps, sans congés, sans week-ends, avec des semaines et des journées à rallonge, au fond, une moyenne de 45 000 euros par mois, ce n’était pas cher payé. Elle a aussi déclaré que « l’argent n’avait jamais été son moteur ». Parbleu. Quand on n’en a jamais manqué, il est plus facile de le relativiser. Quand on pense aux paysans et à tous ceux qui tirent le diable par la queue en ce moment alors qu’ils consacrent toute leur énergie à leur travail, et qui aimeraient toucher 10 ou 20 fois moins, simplement pour survivre, on croit rêver. En grattant un peu, on se rend compte que AOC a passé sa vie à grenouiller et faire des pieds et des mains pour faire carrière, mais elle manque totalement de sens politique, même au niveau le plus élémentaire. Elle a bénéficié pour le moment du soutien d’un camarade de promotion à l’ENA, un certain Emmanuel Macron, mais les meilleures choses ont une fin, et je ne donne pas cher de son maintien à un poste aussi délicat.