La coupe est pleine
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 3 janvier 2024 10:57
- Écrit par Claude Séné
La France entière compatit avec les habitants frappés par des inondations catastrophiques, notamment dans le Pas-de-Calais, qui ont contraint beaucoup d’entre eux à quitter leur logement, la mort dans l’âme, jusqu’à sept fois consécutivement en seulement quelques mois. À bout de nerfs, certains laissent éclater leur désespoir ou leur découragement, et voudraient comprendre. Devant une telle injustice, la tentation est grande de chercher des responsables sur lesquels ils pourraient de défouler, que ce soit les élus, locaux ou nationaux, accusés de ne pas en avoir fait suffisamment dans les décennies écoulées, ou l’état, qui n’aurait pas suffisamment anticipé les dérèglements climatiques que nous subissons.
Tout ceci n’est pas faux, bien entendu. Il y aurait 13 millions de Français qui habitent dans des zones inondables, et l’artificialisation croissante des sols n’arrange rien. Le ruissellement est évidemment accentué par la croissance exponentielle des surfaces bétonnées qui empêchent les eaux de s’infiltrer dans des nappes souterraines, qui, de toute façon, finissent par être saturées dans un contexte de précipitations excessives. Certains, à juste titre, soulignent également le rôle néfaste d’un aménagement du territoire favorisant la concentration de l’activité agricole, avec le regroupement de parcelles au détriment des haies. Pour gagner quelques hectares à labourer, on a détruit tout un écosystème sans même s’en rendre vraiment compte, et malgré les avertissements de quelques opposants, lanceurs d’alertes. De tels débordements, au sens propre comme au sens figuré, font relativiser les débats récents sur les fameuses « bassines », dont on voit bien qu’elles ne résoudront pas la question plus globale de la gestion de la ressource en eau.
Ces inondations spectaculaires ont le mérite d’obliger tout un chacun à regarder la situation en face. Nos difficultés ne datent pas d’aujourd’hui et les mesures prises dans le passé ont démontré leurs limites. L’influence des gaz à effet de serre, et leurs conséquences sur le réchauffement de la planète et les dérèglements climatiques, a reçu une démonstration en grandeur nature et n’est plus guère contestée par l’ensemble de la communauté scientifique. À court terme, des travaux d’aménagement peuvent être envisagés dans certains secteurs particulièrement exposés, mais on sait par avance que leur impact sera limité. D’ores et déjà, le secteur assurantiel annonce une augmentation massive des primes dans certains secteurs particulièrement menacés, et il est probable qu’à un moment, il jugera le risque trop élevé et cessera de proposer de s’assurer. Beaucoup d’agriculteurs sont déjà dans cette logique et ne peuvent compter que sur la solidarité nationale pour compenser en partie les pertes liées aux aléas climatiques. À plus long terme, ce sont des actions volontaristes, à l’échelle de la planète, qui permettront, on l’espère, de limiter les dégâts. Il est encore temps, mais tout juste.