Jeune ministre, vieilles recettes
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 6 décembre 2023 11:33
- Écrit par Claude Séné
Gabriel Attal est devenu à 34 ans le deuxième plus jeune ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, seulement devancé par Jean Zay, qui n’avait que 31 ans à sa nomination dans le gouvernement du Front populaire. Mise à part la jeunesse, les parcours des deux hommes sont diamétralement opposés. Dans sa courte carrière, dramatiquement écourtée par la guerre, Jean Zay aura eu le temps d’ouvrir l’école sur la vie, développant le sport avec Léo Lagrange et les activités culturelles comme le théâtre ou les musées. Il créera aussi les classes vertes, les classes de mer ou les classes de neige.
Autres temps, autres mœurs, dès sa nomination, Gabriel Attal s’est surtout attaché à faire oublier son éphémère prédécesseur Pap N’Diaye, en occupant le terrain médiatique. Le voici qui saisit la perche de la publication du rapport trisannuel dit PISA pour programme international pour le suivi des acquis des élèves. Les jeunes de 15 ans dans les pays de l’organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sont évalués sur leurs compétences en lecture, en sciences et en mathématiques, et les résultats ne sont pas bons. Le niveau général a baissé, en partie probablement à cause du Covid, mais cela n’explique pas tout. La France occupe une place peu glorieuse de 23e, juste avant l’Espagne et juste après l’Allemagne, qui a légèrement redressé la barre. Les pays les mieux classés sont tous asiatiques et notamment Singapour. Ce qui pourrait être lié à la place que représente dans ces pays la réussite scolaire. On sait que beaucoup d’écoliers asiatiques font deux journées en une à grands coups de cours particuliers. Je ne suis pas certain que ce soit une panacée pour une vie équilibrée d’enfant ni de futur adulte.
Pour remonter la pente, le ministre a commencé à dévoiler une série de mesures, pompeusement intitulées « le choc des savoirs » grâce auxquelles l’école devrait pouvoir renforcer les savoirs fondamentaux, que chaque ministre entend promouvoir, comme un mantra purement incantatoire. En consultant la liste non exhaustive des projets ministériels, on a l’impression d’assister à un jour sans fin, ou au retour vers le futur, ce qui n’a rien d’étonnant puisque Gabriel Attal a fait ses classes de Secrétaire d’État auprès de Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l’éducation particulièrement rétrograde. Il remet donc sur le tapis, ou en dessous, avec la poussière, l’épineuse question du redoublement, qui désormais pourrait être décidée par le conseil de classe même si la famille ne le souhaite pas. Résumer la réussite scolaire à ce débat est évidemment caricatural, et me parait bien dérisoire. De mon expérience personnelle et professionnelle, j’ai tiré la conclusion qu’une démarche d’apprentissage passe d’abord et avant tout par une relation interpersonnelle. C’est de sa qualité que dépend essentiellement son succès.