Les « ratés » de la psychiatrie

Si vous posez la question aussi bien au grand public qu’aux spécialistes de la Santé, tout le monde ou presque va tomber d’accord sur le fait que nous manquons cruellement de personnel dans le domaine, ce qui crée des déserts médicaux un peu partout en France. La situation est précaire pour les généralistes, elle est plus que tendue dans certaines spécialités, et la santé mentale dans son ensemble constitue un secteur totalement sinistré. C’est pour cette raison que l’on ne peut qu’être désolé de constater que certains beaux esprits gâchent leur talent dans des métiers subalternes, tels que diriger un ministère, fût-il aussi important que celui de l’Intérieur, ou un parti politique, même s’il semble avoir le vent en poupe en ce moment.

En effet, le diagnostic du « docteur » Darmanin est tombé comme le couperet d’une époque révolue. En aucun cas ses services ne peuvent avoir la moindre responsabilité dans le passage à l’acte d’un ancien condamné pour terrorisme. Par conséquent la faute ne peut en incomber qu’à une erreur d’appréciation d’un psychiatre, qui, par bonheur, ne lui aurait pas administré de force une camisole chimique suffisamment forte pour le dissuader de commettre cette folie. Bizarrement, le ministre a été contredit par son confrère du Rassemblement national, le « docteur » Bardella, qui affirme, lui, que le coupable étant par définition incurable, il convenait de l’enfermer à vie dans un asile ou dans une geôle, au choix. En réalité, ces deux éminents spécialistes sont d’accord sur le point de la méthode : la manière forte, dans tous les cas. La prochaine étape est claire comme de l’eau de roche : le retour de la guillotine, qui coûte beaucoup moins cher que la surveillance, ou encore mieux, la bonne vieille méthode de Charles Lynch, au pays de l’autodéfense.

Ce que nos « experts » en psychiatrie, qui ont manifestement « raté » leur vocation, ne nous disent pas, c’est le lien qui unirait santé mentale et radicalisation, et c’est cependant central. Pour certains éditorialistes de café du commerce, un terroriste islamiste est nécessairement fou, alors qu’il est capable de raisonnement, mais qu’il défend des valeurs antinomiques de notre conception de l’humanité. Sur le plan du droit, c’est très différent. Une personne qui commet un crime ou un délit, alors que son discernement est altéré, de façon temporaire ou permanente, totalement ou partiellement, relève du soin et non de la sanction. Ce qui n’est pas moins contraignant pour l’auteur des faits, qui peut être séparé de la société sans limites de temps. Il semblerait que le responsable de l’attentat du 15e arrondissement de Paris était radicalisé et a agi par conviction et allégeance à une idéologie mortifère et religieuse, tout en étant atteint de troubles psychiatriques importants, pour lesquels il avait suivi un traitement médicamenteux, arrêté depuis quelques mois en concertation avec son médecin.