Partout et nulle part
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 28 novembre 2023 10:41
- Écrit par Claude Séné
Un homme de 55 ans a été tué dimanche dernier à Dijon, alors qu’il dormait tranquillement chez lui dans son lit. Il a été atteint par une balle perdue au cours d’une fusillade qui s’est déroulée au bas de son immeuble, un emplacement connu des services de police comme un point de deal. Il s’agirait donc d’un « règlement de comptes » comme on disait dans l’immédiat après-guerre, et qu’on aurait tendance à désigner comme une lutte pour le contrôle du trafic de stupéfiants, de nos jours. On constate en effet un développement exponentiel de cette économie parallèle, qui touche bien au-delà des quartiers dits sensibles des grandes métropoles.
Un fait-divers qui amenait une commentatrice sur l’antenne d’une station d’information continue à déclarer que « nous ne sommes plus en sécurité nulle part ». Sous-entendu, même chez soi, dans son lit, on ne peut pas être certain d’être à l’abri d’un concours de circonstances qui aboutirait à un danger, y compris mortel. Jusque-là, ça va. Après tout, d’un point de vue statistique, l’endroit le plus dangereux est effectivement son propre lit, puisque c’est là que la plupart des gens passent de vie à trépas. Serait-ce une raison pour décider de ne jamais se coucher pour se mettre à l’abri ? Personne de sensé n’en tirerait cette conclusion. Et pourtant, de ces prémisses banales, on a pu déduire, non sans une certaine mauvaise foi, que c’était bien la preuve que l’on était en danger partout et tout le temps. Il ne restait plus qu’à désigner les coupables. Et c’est là qu’une deuxième affaire tombe à point nommé, celle de la mort de Thomas, ce jeune de 16 ans, poignardé pendant un bal de village dans des circonstances encore mal connues, mais parfaitement claires pour la fachosphère qui s’est mobilisée immédiatement sur les réseaux sociaux, et s’est empressée de dénoncer tant les populations issues de l’immigration que ceux qui les traitent avec une coupable indulgence.
La presse notamment est accusée de cacher la vérité en ne donnant pas les noms des suspects, parce qu’ils sont de consonance maghrébine, bien que tout à fait français. Ceux que la police qualifie d’ultradroite, une frange violente de groupuscules dont le Rassemblement national constitue la vitrine légale, ont défilé un peu partout, dans des actions coordonnées, en réclamant officiellement « justice pour Thomas », mais surtout en accusant les immigrés, les étrangers, et assimilés jusqu’à un nombre élevé de générations, de tous les maux dont souffre la société française. Le slogan le plus classique en pareil cas consiste à clamer haut et fort « on est chez nous » pour bien souligner que les « autres », quels qu’ils soient, sont des intrus. Cela rappellera aussi que le journal le plus abject, fasciste, ouvertement antisémite, pronazi, réactionnaire, puis collaborationniste, qui a sévi de 1930 à 1944, avait pour nom : « je suis partout ».