Le temps béni des colonies

Le porte-parole de l’armée israélienne qui fait office en ce moment de représentant d’un gouvernement qui fait bloc, faute de mieux, autour de Benyamin Netanyahou, a annoncé comme une victoire la partition de la bande de Gaza en deux entités, le Nord et le Sud, dont on ne sait pas encore si elles deviendront à terme des territoires à part entière, soumis ou non à l’occupation du voisin israélien. Il semble d’ailleurs qu’Israël ne le sait pas lui-même. Son objectif annoncé reste l’anéantissement du Hamas, et il n’est pas certain qu’il soit atteignable sans une présence militaire de longue durée dans la région de Gaza.

Ce qui amène à l’épineuse question de la dissémination de colonies juives dans les « territoires », qui entraîne une protection militaire, et parfois la formation de milices pour assurer la sécurité des colons et de leurs familles. Je voyais récemment sur une chaine d’information une carte montrant l’implantation de ces colonies en Cisjordanie, et l’on aurait dit un morceau de gruyère, dans lequel les trous seraient plus étendus que le fromage lui-même. Leurs occupants, bien que ne détenant ni droits ni titres, sont persuadés de leur légitimité sur le territoire, et sont prêts à faire le coup de feu pour défendre leur implantation, comme avant eux les fermiers américains contre les Indiens voulant récupérer leur terre. Que ce soit le Premier ministre actuel ou un autre, on voit mal un dirigeant israélien demander à ces colons de quitter les lieux, et ce sont souvent les éléments les plus à droite et les plus nationalistes de la population. Leur existence même est un obstacle à la recherche d’un compromis acceptable par les deux parties dans une solution dite « à deux états » qui reste la seule voie possible vers la paix.

Une négociation éventuelle, dont les prémisses sont en ce moment totalement absentes, devra trouver une solution à cet état de fait, et ce sera d’autant plus difficile que les Israéliens, même les plus modérés, ne considèrent pas les colonies comme telles, en se référant à la notion de terre promise, qui leur donnerait tous les droits, alors que le droit international, défini par l’Organisation des Nations Unies, et conforté par les traités entre les états, devrait s’imposer en la matière. C’est pourtant cette position qu’un ancien premier ministre, opposant déclaré à Netanyahou, a défendue publiquement il y a peu. Une telle attitude ne peut tenir que par la force. Le corollaire des colonies est nécessairement la pratique d’une politique de la canonnière. Toute la stratégie du gouvernement israélien précédent a été de gagner du temps en affaiblissant l’adversaire palestinien et en comptant sur la force d’inertie pour pérenniser un état de fait, dans lequel la domination israélienne finirait par s’imposer. Elle a échoué, et tout reste à faire.