Immigration : le psychodrame
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 25 octobre 2023 11:05
- Écrit par Claude Séné
Ou devrais-je plutôt dire : « la pantomime » ? Alors que certains journaux titrent encore sur la fausse confidence de la Première ministre qui aurait évoqué avec Bruno Retailleau, chef de file des Républicains au Sénat le retrait possible de l’article 3 de la future loi sur l’immigration, le patron de son parti dément formellement avoir reçu cette ouverture de la part d’Élisabeth Borne. Pire encore, Éric Ciotti a menacé sur France Inter de déposer et naturellement de voter une motion de censure si le gouvernement tentait de passer en force comme il en a pris la détestable habitude en engageant sa responsabilité au nom de l’article 49.3 de la Constitution.
Si vous avez raté un épisode, ou si vous avez oublié de quoi il retourne, l’article 3 de la loi immigration prévoit la régularisation de travailleurs dans les métiers dits « en tension », comprenez ceux pour lesquels l’économie française manque de bras autochtones, et souvent parce qu’ils sont mal payés, ou avec des conditions de travail difficiles. Selon les partis de droite, accepter de pérenniser des salariés entrés illégalement pour certains, mais complètement intégrés, et participant pleinement à l’économie du pays dans lequel ils ont souvent établi leur existence depuis de nombreuses années, serait de nature à encourager l’immigration massive d’étrangers, au nom de la théorie fumeuse jamais démontrée d’un soi-disant « appel d’air ». Le gouvernement, du temps de sa superbe, quand il s’appuyait sur une majorité tout acquise à sa cause, c’est-à-dire le bon plaisir présidentiel, pouvait s’offrir le luxe de se tenir à équidistance des partis d’opposition en feignant d’occuper la position centrale, la plus raisonnable, celle du « en même temps ».
Désormais, il ne peut compter que sur ses propres forces et doit cheminer, au risque de chuter, sur une ligne de crête périlleuse. Et, comme la tour de Pise, il penche à droite, selon sa pente naturelle. La fausse nouvelle d’un compromis avec l’opposition des Républicains a obtenu un écho immédiat, car tous les observateurs savent que le président ne peut pas trouver de soutien à gauche avec une position aussi timide. Si des régularisations se produisent, comme il est de coutume, il est inadmissible qu’elles se fassent exclusivement sur des critères économiques, au nom d’une « immigration choisie » où le cynisme l’emporte largement sur l’humanitaire et la générosité. Non, l’allié « naturel » du pouvoir ne peut être que le parti des Républicains, qui menace beaucoup, mais qui n’a jamais franchi le pas pour le moment, ni dans un sens ni dans l’autre. L’éventualité d’une dissolution qui ne profiterait qu’au Rassemblement national dans l’état actuel de l’opinion y est sans doute pour quelque chose. Si c’est une pantomime, comme dans la comedia del arte, la fin n’est pas encore écrite.